Valachie

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Les Valachies (ou Romanies populaires) à la fin de l'Empire romain

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  • Volcae (Volques) : dénominations dont dérive « Walh » ("non-germain"), à l'origine de Wales (Galles), Wallon, Welsh, Walha (Gallo) et de Valachie.
  • Violet : zones romanisées d'où les langues romanes ont disparu au VIIe siècle.
  • Rose : Zones romanisées où les langues romanes ont continué à être parlées.
  • Jaune : zones où les langues romanes avaient disparu mais que leurs locuteurs ont réinvesti par la suite, depuis le VIIIe siècle.
  • Vert : zones où les langues romanes ont été parlées depuis le VIIIe siècle, mais d'où elles ont disparu par la suite.

En français, le mot valachie, prononcé[1] et parfois écrit « valaquie », est une dénomination polysémique, pouvant être :

Cet article traite du nom commun ; pour le nom propre, voir Valachie (région), Valachie intérieure, Bogdano-Valachie, Hongro-Valachie, Morlaquie, Valaquie morave et Valaques.

Origine

Le mot walach tire son origine de l'ancien germanique walh qui signifie « locuteur d'une langue celtique ou latine » et qui lui-même viendrait du nom d'un peuple celte : les Volques. Walach désignait aussi des Celtes : les Welsh des Anglo-Saxons, les Walhs des Francs. Le « W » germanique donne un G dur en français : Welsh a donné « Galles » (Pays de…) et Walh : « Gaule », que les lettrés ont rapproché de la Gallia romaine. Le patronyme d'origine flamande De Gaulle signifie aussi « le non-germain ». Selon R. Rohlfs[2], "Walh" aurait également donné Galles (pour Wales), pays Gallo et Gaule en français d'oïl, car dans cette langue le wa initial et le alh donnent respectivement ga (wardan = garder, waidanjan = gagner) et aule (salh = saule) : Gaule ne viendrait donc pas du latin savant Gallia qui en français courant aurait donné "Geaille" (car les latins ga initial et li devant voyelle donnent en langue d'oïl respectivement ja ou gea comme dans galbinum = jaune, gaiium = geai ou gabatam = jatte, et ill comme dans alium = ail ou filiam = fille). Ce mot aurait également donné les mots Wallon et Wallonie dont la région fut l'une des zones frontières entre les anciens territoires Celtes et Germaniques (voir l'Histoire du terme Wallon et l'Histoire du terme Valaque).

Spécificité

Historiquement, il ne faut pas confondre les « valachies » (ϐλαχίες, nom commun[3]) avec les régions historiques de Roumanie (Μολδοβλαχικές ηγεμονίες / χώρες, noms propres[4]), ni avec les « valachades » (ϐαλαχάδες beaucoup plus tardives, communautés hellénophones musulmanes dont l'étymologie remonte au nom Allah[5]). Pour qu’un pays traditionnel ou une « région ethnographique » soit une « valachie », il faut qu’il se soit gouverné de manière autonome par une noblesse roumaine selon le jus valachicum (« droit valaque »)[6]. Par exemple :

Définition

En 1265 certaines valachies étaient intégrées au Regnum Bulgarorum et Valachorum (bleu clair) sur le bas-Danube, une autre se trouvait en Thessalie (bleu foncé).
Les régions ethnographiques roumaines en Transylvanie (rose), Maramureș (bleu), Satu Mare (vert), Sălaj, Bihor et Zărand (jaune) et Banat (violet).

Aujourd'hui le nom peut désigner en français deux réalités, l'une historique (valachie, nom commun), l'autre géographique actuelle (Valachie, nom propre)[7].

Les « valachies » historiques du bas-Danube et des Balkans sont mentionnées dans les sources anciennes pour les distinguer des « sklavinies » qui s'y multiplient à partir du VIe siècle[10] :

La principauté de Transylvanie incluait de nombreuses valachies (țări, cnezate, jupânii) mais n'en était pas une au sens juridique, puisqu'elle était gouvernée par une aristocratie devenue en majorité hongroise ; elle n'en figure pas moins sur des cartes anciennes sous la dénomination de « Valachie intérieure » (Valachia interior) c'est-à-dire « intérieure » au Royaume de Hongrie dont elle était la vassale[11],[12].

Les habitants des valachies, gouvernées par une noblesse roumaine selon le jus valachicum (vlach jog en Hongrie)[13], sont les « Valaques » (parfois transcrit par erreur Vlachs, Volokhs ou Wallaches depuis d'autres langues), dénomination qui elle aussi prend soit un sens géographique (habitants du sud de la Roumanie actuelle), soit un sens historique (locuteurs des langues romanes orientales au cours des temps).

À propos des valachies, l'historien Lucien Musset écrit : « l'évolution de tout l'avant-pays romain danubien, de la Souabe à la Transylvanie, doit être considérée comme un tout. Les habitants les plus occidentaux furent finalement germanisés, ceux du centre submergés par l'invasion magyare. Seuls se maintinrent ceux de l'Est et du Sud. La vraie énigme ne serait pas tant leur survie, que l'extraordinaire fortune démographique des îlots valaques de Transylvanie, alors que ceux des Balkans n'ont guère fait que dépérir lentement »[14]. Mais, selon Florin Constantiniu de l'Académie roumaine, dans son Histoire sincère du peuple roumain, il n'y a point d'énigme : les romanophones du bassin du bas-Danube étaient surtout des bergers transhumants, nomadisant sur les deux rives du fleuve, entre les Carpates et le Pinde[15], et si le roumain et l'aroumain font partie de que les linguistes nomment l'« union linguistique balkanique »[16]c'est parce que les langues romanes orientales présentent des structures typiques de ce qu'Arnaud Etchamendy définit comme une « pidginisation pastorale »[17]. Si, du XIe au XIVe siècle, leur nombre augmente au nord du fleuve et diminue au sud, c'est pour des raisons politiques et économiques : à ce moment le royaume de Hongrie commence à stabiliser la situation au nord, favorisant la sédentarisation des Valaques, tandis qu'au sud, les guerres bulgaro-byzantines de Basile II suivies des violences de la quatrième croisade, de la conquête ottomane et de leurs conséquences, entretiennent au contraire, une insécurité croissante[18].

États modernes

Aujourd'hui, on pourrait considérer comme des valachies la Roumanie, état issu de la renaissance culturelle roumaine, dont la Constitution et les lois sont promulguées par des représentants issus en grande majorité du peuple roumain, et dans une moindre mesure la Moldavie, état dont la Constitution et les lois sont le résultat d'une longue série de compromis politiques entre la majorité roumanophone (deux tiers de la population) et les colons slavophones soutenus par la Russie (un tiers de la population). Le roumain est langue officielle dans ces deux pays. Les autres valachies ne sont plus que des noms géographiques ou bien des régions ethnographiques où perdurent quelques minorités romanophones et parfois seulement quelques mots d'origine romane dans la langue slave locale (cas de la Morlaquie et de la Valachie morave).

Controverses nationalistes

Dans le contexte des nationalismes des XIXe siècle, XXe siècle et XXIe siècle, la notion de « valachie » au sens de « romanie populaire » comme équivalent romanophone des « sklavinies » slavophones, est réfutée avec véhémence selon le principe « absence de preuves irréfutables = preuve indubitable d'absence » ce qui conduit à la cristallisation de deux thèses historiques irréconciliables. La thèse austro-hongroise et germanique surnommée Awarenwüste (« Désert des Avars »)[19] postule que les locuteurs des langues romanes orientales sont apparus exclusivement au sud du Danube et ne sont venus au nord que tardivement après les Magyars, le « droit valaque » n'étant rien d'autre qu'une exemption de taxes accordée par les rois hongrois à leurs nobles pour défricher des terres royales avec des ouvriers agricoles valaques serfs, importés des Balkans[20]. La thèse bulgaro-yougoslave postule que les locuteurs des langues romanes orientales sont apparus exclusivement au nord du Danube et ne sont venus au sud que tardivement après les Slaves et en très petit nombre[21]. Ces auteurs « exclusivistes » usent et abusent, pour se discréditer les uns les autres, de la méthode hypercritique[22],[23].

La contradiction entre leurs deux thèses, largement diffusées, crée l'illusion historiographique d'une disparition totale des langues romanes orientales du IIIe au XIIIe siècle, suivie d'une inexplicable réapparition tardive[24]. Certains historiens roumains comme Gheorghe I. Brătianu en ont profité pour qualifier les Roumains d'« énigme et miracle historique »[25] tandis que d'autres s'appuient sur la linguistique, la toponymie et l'archéologie pour montrer que les romanophones orientaux n'ont certes pas fondé de grands et puissants royaumes, mais n'ont pas pu disparaître pour ressurgir « miraculeusement » après un millénaire d'absence, d'autant qu'aucun argument n'étaye la thèse selon laquelle ils auraient été le seul groupe linguistique d'Europe du Sud-Est à ne pas pouvoir franchir les Balkans, les Carpates et le Danube, eux qui avant le XIIIe siècle étaient principalement pasteurs transhumants[26].

Bibliographie

Sur les autres projets Wikimedia :

Ces ouvrages ont également servi à l'établissement des cartes jointes :

  • Atlas istorico-geografic de l'Académie roumaine, Bucarest 1995, (ISBN 973-27-0500-0),
  • Alexandru Filipașcu, Istoria Maramureșului, Bucarest 1940, 270 p.,
  • Dinu Giurescu, Istoria ilustrată a Românilor, éd. Sport-Turism, Bucarest 1981, p. 72-121,
  • G. I. Brătianu, Recherches sur Vicina et Cetatea Albă, Univ. de Iași, 1935,
  • Florin Constantiniu et al., Istoria lumii în date, éd. Enciclopedică, Bucarest 1971,
  • Théophane le Confesseur et Georges Cédrène, in : Nicolae Iorga, Teodor Capidan, Constantin Giurescu : Histoire des Roumains, éd. de l'Académie roumaine,
  • Nicolae Iorga, Istoria românilor, Part II, Vol. 2, Oameni ai pământului (avant l'an 1000), Bucarest, 1936, 352 p. and Vol. 3, Ctitorii, Bucarest, 1937, 358 p.,
  • Thede Kahl, Rumänien: Raum und Bevölkerung, Geschichte und Gesichtsbilder, Kultur, Gesellschaft und Politik heute, Wirtschaft, Recht und Verfassung, Historische Regionen
  • Chroniques de Jean Skylitzès, 976, in : Petre Ș. Năsturel, Études d'Histoire médiévale, Inst. d'Histoire "Nicolae Iorga", vol. XVI, 1998,
  • Ion Nistor, L'origine des Roumains des Balkans et les Valaches d'Épire et de Thessalie, annales de l'Académie roumaine, série 3, tome 2, mém. 7, Bucarest 1944
  • Constantin-Mircea Ștefănescu, Nouvelles contributions à l’étude de la formation et de l’évolution du delta du Danube, Paris, Bibliothèque nationale, 1981,
  • Gheorghe Postică, Civilizația veche românească din Moldova, éd. Știința, Chișinău 1995,
  • George Vâlsan: Opere Alese (dir.: Tiberiu Morariu), éd. științifică, Bucarest 1971.

Notes

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