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Histoire

Contexte historique et religieux

L'institution canoniale apparaît en occident au VIe siècle, lorsque le clergé de certaines églises pratiquant la vie commune se donne le nom de canonicus. Au milieu du VIIIe siècle, l'évêque de Metz Chrodegang donne une règle aux chanoines de sa cathédrale, fondée sur une lettre d'Augustin d'Hippone décrivant l'organisation du clergé de son diocèse, qui constitue à partir de ce moment la règle de Saint Augustin. L'œuvre administrative des Carolingiens aboutit à une claire distinction de chaque type de clergé, de ses obligations et droits. Ainsi moines et chanoines se distinguent clairement lorsque Louis le Pieux édicte en 817 une même règle pour tous les chanoines, la règle d'Aix-la-Chapelle (18). Du IXe au XIe siècle, l'implication dans les affaires temporelles, l'enrichissement des communautés, et l'immixtion des puissances séculières mènent à une décadence de l'observance religieuse à laquelle la réforme grégorienne veut porter remède. Le synode de Latran de 1059 lance le mouvement en prônant la désappropriation personnelle effective de tout bien, et l'observance stricte de la vie commune. Les chanoines du Latran sont les premier à se réformer selon ces lignes. Lors de ce synode, le moine Hildebrand (futur pape Grégoire VII) prononce un violent réquisitoire contre la règle d'Aix-la-Chapelle, qui tolère la propriété personnelle. C'est dans ce contexte de réforme et de retour aux sources, parfois idéalisées, de l'institution canoniale, que prend place la fondation de l'ordre de Prémontré. (20) Un autre fait majeur dans cette fondation est la querelle des investiture qui fait rage à l'époque. Norbert de Xanten y prend part en qualité de chapelain à la cour impériale, fonction qu'il assure à partir de 1108 ou 1109, et qui le mènent à assister (sans pour autant y participer) aux voies de fait violentes de l'empereur Henri V envers le pape Pascal II en 1111. (21)

Fondation

Norbert de Xanten, fresque du XIV e S, abbaye Saint-Sévère d'Orvieto.

En 1119, l'évêque de Laon, Barthélemy de Jur, en route vers Reims pour participer à un concile convoqué par le pape Calixte II, rencontre près de l'abbaye de Saint-Thierry trois clercs, dont son propre cousin germain Norbert de Xanten, et son disciple Hugues de Fosses. Norbert a reçu en 1118 du pape Gélase II la mission de prêcher partout la pénitence et la paix de Dieu, et désire faire renouveler cette mission par le pape nouvellement élu, présent à Reims en raison du concile. Séduit par sa personnalité, Barthélémy introduit Norbert auprès du pape, mais celui-ci ne juge pas cette vie vagabonde convenable à un clerc, et lui ordonne de rejoindre le diocèse de Laon. L'évêque souhaite justement la réforme de l'abbaye Saint-Martin de Laon selon les principes de la réforme grégorienne, et y envoie Norbert, qui échoue à convaincre la communauté des chanoines de cette abbaye[1]. En effet, c'est à cette époque que la distinction entre chanoines réguliers pratiquant la désappropriation de leurs biens, et chanoines séculiers les conservant. Norbert participe ainsi à un mouvement plus large encourageant le renoncement aux biens terrestres, comme le demande la règle de Saint Augustin[2].

Première assemblée de Norbert de Xanten et ses premiers disciples en la forêt de Laon.

En 1120, après plusieurs tentatives d'établissement à Foigny-en-Thiérache et Thenailles, Norbert reçoit de Barthélémy un terrain dans la forêt de Voas (aujourd'hui la forêt de Saint-Gobain dans l'Aisne) au lieu-dit « Presmontré » pour y fonder une abbaye. Il ne s'y trouve alors qu'une petite chapelle dédiée à saint Jean-Baptiste. Une lettre à Barthélémy, conservée dans la première biographie de Norbert, explique ce choix: "Mon seigneur et mon père, c'est ici que je veux demeurer. J'ai reconnu le lieu que le Seigneur m'a destiné. Ce sera mon siège et mon repos. Beaucoup d'hommes y trouveront le salut. Toutefois ce n'est pas cette chapelle qui en sera le centre; c'est de l'autre côté de la vallée qu'on bâtira la maison. Cette nuit, j'ai vu en songe une multitude d'hommes en blanc qui faisaient processionnellement le tour de la vallée avec des croix d'argent, des chandeliers, et des encensoirs"[3].

Pour s'adjoindre des compagnons, le fondateur se rend à l'école cathédrale de Laon, dont l'écolâtre est alors Raoul, frère du célèbre Anselme de Laon, et convainc à l'issue d'un sermon sept étudiants de l'accompagner, dont le futur grand théologien Anselme de Havelberg. Les tournées de prédications ultérieures de Norbert lui apportent d'autres disciples, dont Evermode de Ratzebourg. Dès la fête de Pâques 1121, la vie régulière est en vigueur à Prémontré, et la communauté se procure des reliques des saints Géréon, Ursule, et des deux saints Ewald, auprès de l'archevêque de Cologne, Frédéric de Schwarzenburg[4]. L'ordre Prémontré compte dès l'origine des chanoines de choeur, voués à l'office divin et à des tâches pastorales, et des convers plus nombreux encore, jouant un rôle important dans la vie quotidienne des abbayes par l'exercice du travail manuel[2].

Passant près de Namur, Norbert reçoit de la comtesse Ermesinde de Luxembourg sa villa de Floreffe avec la demande d'y placer des frères. La première fondation de Prémontré est ainsi effectuée avant même que la communauté-mère soit érigée en abbaye. Lorsqu'il est nécessaire de choisir une règle de vie pour la nouvelle communauté, Norbert, sous l'influence d'un rêve où saint Augustin lui apparaît, choisit la règle augustinienne, qu'il connaît pour l'avoir vêcue dans sa jeunesse comme chanoine de la collégiale de Xanten. Les premières professions religieuses d'une quarantaine de frères ont lieu le jour de Noël de l'année 1121[5]. L'église abbatiale est rapidement élevée, et consacrée le 18 novembre 1122 sous le titre de Notre-Dame et saint Jean-Baptiste par Barthélémy de Jur et Lisiard de Crépy, évêque de Soissons. Le roi Louis VII confirme la fondation par un diplôme royal, et lui concède de porter le lys de France sur ses armes[6]. La fondation d'une abbaye féminine à Prémontré suit de peu, sous l'impulsion de Ricvère de Clastres, veuve d'un noble du Vermandois, Aymond de Clastres ; en 1149 les religieuses norbertines sont plus de 1000[7].

Norbert reçoit la règle des mains de saint Augustin. Illustration d'une Vie de Saint Norbert, vers 1140.

Première expansion

L'abbaye de Floreffe est officiellement érigée le 25 janvier 1122. Elle est suivie de nombreuses autres fondations, dont les monastères doubles d'hommes d'une part et de femmes de l'autre, de Cappenberg, Varlar, et Ilbenstadt, toutes dues à l'entrée en religion du comte Godefroy de Cappenberg, de son épouse Jutta, et de son beau-frère Othon[6]. En revanche, quand le comte de Champagne Thibaud de Blois désire lui aussi rejoindre l'ordre, Norbert le renvoie à ses responsabilité séculières, avec un règlement de vie chrétienne adaptée. C'est la naissance du tiers-ordre de Prémontré[8].

En 1124, une petite délégation venue de Prémontré sous la direction de Gauthier de Saint-Maurice prend en charge l'abbaye Saint-Martin de Laon, qui prend la deuxième place dans l'ordre en souvenir des fonctions de prévôt du chapitre que Norbert y avait exercé. La même année, l'abbaye Saint-Michel d'Anvers est fondée, à l'occasion d'une tournée de prédication de Norbert et de ses compagnons contre les théories sur l'eucharistie de Tanchelin. C'est en souvenir de cette prédication que Norbert est souvent représenté portant un ostensoir[8]. En 1124 toujours, l'abbaye du Mont-Cornillon est fondée par un disciple de Norbert, Luc du Mont-Cornillon (66)

Crypte de l'abbaye de Jerichow, contemporaine de sa fondation en 1144.

Le 16 février 1125, le pape Honorius II approuve solennellement l'ordre de Prémontré. La même année, Norbert se trouvant de passage à Spire, il est élu par une diète solennelle archevêque de Magdebourg. Il y installe immédiatement des chanoines de Prémontré en l'église Notre-Dame, et fait élire Hugues de Fosses pour sucesseur dans la charge abbatiale. Les fondations se multipliant, il devient nécessaire de structurer l'ordre, jusqu'alors constitué d'abbayes indépendantes. Hugues prend modèle sur la charte de charité unissant entre elles les abbayes cisterciennes, et rédige avec les autres abbés une charte qui est approuvée en 1124 par les légats pontificaux Pierre de Léon et Grégoire de Saint-Ange (53). Norbert quant à lui meurt le 6 juin 1134 à Magdebourg[9]. Du vivant même de Norbert, un grand nombre d'abbayes sont fondées, dont les plus notables sont Sainte-Marie au Bois, Cuissy, Grimbergen, Saint-Paul de Verdun[10]. Hugues de Fosses peut être considéré comme le deuxième fondateur de l'ordre, présidant à son institutionnalisation. Il fait notamment rédiger la première biographie de Norbert, et les livres liturgiques propres à l'ordre, chaque communauté ou diocèse jouissant alors de la liberté d'organiser à sa manière l'office divin. C'est la naissance du rite prémontré. Hugues doit aussi faire voter et rédiger des statuts précis inspirés là encore de ceux de Cîteaux, la règle de saint Augustin permettant des interprétations trop différentes pour maintenir l'unité d'observances dans l'ordre[11]. Suivant l'exemple de Vital de Savigny, il ordonne par prudence la fin des monastères doubles d'hommes et de femmes, et fait établir les monastère féminins à plus grande distance des masculins. Cette décision a pour conséquence que les chanoinesses, ne pouvant plus assister à la liturgie des chanoines, se divisent entre soeurs de choeur et soeurs converses. (60) Hugues de Fosses doit aussi lutter contre Gautier de Mortagne, successeur de Barthélémy de Jur sur le siège épiscopal de Laon, qui souhaite récupérer certaines donations faites par son prédécesseur. Hugues de Fosses meurt le 10 février 1161, à la tête d'un ordre comptant alors 120 abbayes[12].

Arche romane menant à la salle capitulaire de l'abbaye de Beauport.

L'ordre continue de se structurer et d'essaimer sous les abbatiats des abbés généraux suivants. La fonction d'abbé général est alors nouvelle dans l'Eglise, ayant été inventée par l'ordre de Cîteaux, ce qui entraîne des difficultés avec les abbés jaloux de leur autonomie, d'autre tiennent à ce que l'ordre de Prémontré se répand vite dans des pays de peuplements et d'usages différents[12]. Néanmoins l'ordre continue son essor avec, au tournant des XIIe et XIIIe siècle, la fondation entre autres des abbayes d'Averbode, de Strahov, Grandchamp, Mondaye, Beauport, La Lucerne, La Belle Paix... L'ordre compte alors plus de 1000 abbayes et prieurés, sans compter les établissements moins importants, en France, Allemagne, Angleterre, Suisse, Autriche, Hongrie, Espagne, Portugal, Pologne, Italie, Grèce, et Etats latins d'orient[10]. Souvent, ces maisons ne sont pas nouvelles, mais sont le résultat de l'agrégation à l'ordre de communautés de chanoines souhhaitant se réformer, ou encore d'évêque affiliant leur chapitre cathédral à Prémontré[13]. Plusieurs figures de sainteté marquent l'ordre au moyen-âge, comme Hermann Joseph de Steinfeld[14]. L'ordre compte aussi des figures intellectuelles de valeur, comme Philippe de Harveng, auteur de traités de théologie et de commentaires exégétiques, et Jean de Sacrobosco, mathématicien et astronome.

En 1236, le pape Grégoire IX intervient directement dans le gouvernement de l'ordre et obtient du chapitre général une réforme de ses statuts. L'intention du pape est de renforcer le gouvernement central de l'ordre, obtenir une uniformité d'us et de coutumes en matière liturgique, accroître les possibilités pour les chanoines d'accomplir un ministère paroissial, et régler définitivement la question de l'éloignement des communautés de chanoinesses de celles de chanoines. (76) Les papes Alexandre IV, Urbain IV, et Nicolas IV font de même, si bien qu'une nouvelle rédaction des statuts est promulguée en 1290. Alors que l'ordre est jusqu'alors essentiellement contemplatif, ces changements dans les statuts transforment définitivement les chanoines prémontrés en clergé paroissial, si bien qu'au milieu du XIIIe siècle, plus de 700 paroisses sont confiées à l'ordre. (77)Au XIIIe siècle, l'ordre compte plusieurs abbés généraux notables, dont Gervais de Chichester, grand pénitencier du pape Innocent III et promoteur de la croisade, avant d'être nommé évêque de Séez par le pape Honorius III[15]. C'est sous l'abbatiat de son successeur Conrad Suève que l'ordre se divise en deux factions, les abbayes dépendant de celle de Magdebourg ayant apporté des changements aux statuts et à l'habit. Un compromis est trouvé en 1228, mettant les abbayes de Magdebourg et de La Chaise-Dieu sous la juridiction de l'évêque de Magdebourg. C'est également sous l'abbatiat de Conrad que l'ordre reçoit l'abbaye Saint-Alexis sur l'Aventin à Rome[16]. Jean de Rocquigny reçoit la charge d'abbé général en 1247, et restaure la discipline dans les monastères de l'ordre. Grand intellectuel, élève d'Alexandre de Hales, c'est lui qui fonde en 1252 le collège des Prémontrés de Paris afin de permettre aux étudiants de l'ordre de suivre des cours à la faculté de Paris[17].

Crises et décadence

Gisant d'un abbé prémontré crossé à l'abbaye de Beauport.

La mort de l'abbé général Jean de Rocquigny en 1269 marque la fin de l'apogée de l'ordre. Celui-ci entre en crise, sous la double pression d'une part d'événements politiques et religieux externes à l'ordre comme la guerre de Cent Ans, le Grand Schisme d'Occident, et la Réforme protestante ; et d'autre part de tendances internes à l'ordre comme la mise en commende des abbayes, le manque de discipline, et les tendances centrifuges d'abbayes regroupées en fédérations nationales, les circaries[18].

En 1290, l'abbé général Guillaume de Louvignies promulgue une nouvelle édition des statuts de l'ordre, enrichies de nouvelles dispositions, ce qui tend à montrer l'inadéquation des statuts primitifs à un ordre aussi nombreux[19]. Témoignage aussi d'une crise de l'ordre, le refus obstiné des abbés d'Angleterre d'assister aux chapitres généraux. Un compromis est atteint en 1316, ne les y obligeant que l'année suivant leur nomination, afin d'y prêter serment. Le chapitre général de 1320 se résoud à regrouper les monastères, devenus trop nombreux, en circaries, c'est à dire provinces formées sur une base géographique ou linguistique. Cela entraîne cependant des évolutions différentes dans les circaries, et une difficulté à garder l'ordre uni[20].

Sous Jean VII, abbé général entre 1391 et 1409, l'usage de la mitre et de la crosse pour les abbés de l'ordre se répant, ce qui est une entorses aux antiques traditions de simplicité et d'humilité[21]. L'apparition des ordres mendiants au XIIIe S, exempts de l'autorité épiscopale par le fait de privilèges obtenu directement du pape, suscite la jalousie des ordres monastiques et canoniaux plus anciens, qui cherchent à obtenir à leur tour la précieuse exemption. En 1409, les Prémontrés l'obtiennent en totalité du pape Alexandre V, qui exempte l'ordre de toute juridiction des patriarches, archevêques, évêques, et autres ordinaires. Le gouvernement de l'ordre en devient plus facile, mais cette mesure le prive du soutien matériel et moral des évêques, répugnant à favoriser l'établissement de communautés dont le gouvernement leur échappe totalement[22].

Graduel prémontré du XVè S.

Jean de la Fère, abbé général entre 1436 et 1443 reçoit en 1438 une lettre énergique du pape Eugène IV ordonnant au chapitre général de corriger les abus et de réformer l'ordre, mais ni lui ni son successeur Pierre Rodier ne parviennent à imposer leur autorité aux abbés. Leur successeur Jean Aguet est plus heureux dans ses tentatives, et son abbatiat inaugure une période faste pour l'abbaye de Prémontré qui voit le nombre de ses religieux augmenter rapidement, et la construction de nouveaux bâtiments. Aguet lutte en particulier contre le pécule, c'est à dire l'habitude pour les chanoines de conserver une part de leurs biens personnels, et même de l'accroître, en totale contradiction avec la règle de saint Augustin. Il prend des mesures fortes contre cette déviance, sanctionnée par la peine d'excommunication, au chapitre général de 1451[23].

Malgré un fléchissement dans l'observance religieuse et les vocations, l'ordre fonde dans cette période quelques abbayes, sainte-Catherine d'Oosterhout en 1271, Sandecez et le Jardin-Fermé en 1410, Genlis en 1421 et Harbingoth en 1442[20]. Mais à partir de 1420, les guerres de religions entre hussites et catholiques détruisent vingt monastères de Bohème, de Moravie et d'Autriche, et les religieuses Prémontrées de Doksany sont massacrées[24].

Pressentant le danger, Hubert de Mont-Hermer, exceptionnellement nommé abbé général par le pape Sixte IV sans élection préalable par le chapitre général, obtient de ce dernier en 1476 une défense expresse de soumettre les abbayes prémontrées au régime de la commende[25]. Cela n'est pas suivi d'effet, et les abbayes de Tongerlo, Saint-Michel d'Anvers, et Grimbergen tombent en commende dès l'année suivante[26]. Celle d'Ardenne suit en 1515, et l'abbaye-mère de Prémontré fait de même en 1533, malgré les démarches de Nicolas Psaume, alors abbé de Saint-Paul de Verdun, pour l'empêcher. Le mouvement devient en effet général dans le royaume de France à la suite du concordat de Bologne de 1516, le roi usant des bénéfices ecclésiastiques comme moyen de récompenser ses partisans, ou de susciter la loyauté chez ceux qui ne le sont pas. La rapacité des commendataires ruine les abbayes, et nuit à la vie religieuse, à tel point qu'il n'est parfois plus possible d'accueillir de novices, comme c'est le cas en 1553 à Prémontré[25].

Le règne du roi Louis XI voit l'abbé général des Prémontrés, Hubert Gobert, entrer au conseil royal.

En 1498, le chapitre général tenu à Saint-Martin de Laon sous la présidence de Jean de l'Ecluse reçoit une lettre du roi Charles VIII lui intimant de restaurer la discipline dans l'ordre, en particulier quant à la clôture monastique, le célibat, l'observance de la règle de saint Augustin, et l'abstinence de viande. Cette lettre est assortie de la menace de confier la réforme de l'ordre à d'autres religieux si les abbés s'en désintéressent[27]. Mais en 1503, le pape Jules II approuve une nouvelle législation plus permissive quant à l'abstinence, et donne au chapitre général les pouvoirs les plus étendus pour modifier les anciens statuts de l'ordre[28].

Les grands désordres constatés dans l'ordre de Prémontré, fort répandu en Allemagne, comptent parmi les causes du succès de la Réforme luthérienne dans ces contrées. Dès 1528, sous le landgrave Philippe de Hesse, la sécularisation atteint les monastères de Hesse, du duché de Würtemberg, du Palatinat, de Saxe, et de Brandebourg. Seul celui de Magdebourg subsiste en Allemagne centrale. Ceux de Poméranie et de Norvège sont aussi perdus pour l'ordre au fur et à mesure que les monarques choisissent la Réforme et l'imposent au clergé et au peuple, selon le principe communément admis : Cujus regio, ejus religio[24]. Les religieux chassés se réfugient dans des Etats catholiques ou abandonnent leur vocation. En Hongrie, c'est l'invasion ottomane qui entraîne la destruction des nombreuses abbayes prémontrées. En 1536, le roi Henri VIII d'Angleterre supprime les 67 établissements prémontrés ainsi que le chapitre régulier de prémontrés de la cathédrale de Withorne lors de la dissolution des monastères. Le dernier prieur de Withorne, Malcolm Flemming, est emprisonné à vie en 1563 pour avoir célébré une messe catholique[29]. En 1580, John Kieran, abbé de la Sainte-Trinité de Killeshandra, est mis à mort à Dublin sous le vice-roi Arthur Grey[30]. Dans le Béarn, l'abbaye Saint-Jean de la Castelle est prise par les Huguenots en 1559 et les religieux brûlés vifs.

En 1561, le colloque de Poissy réunissant les cardinaux et les évêques de France supplie le pape de faire cesser la commende de Prémontré. Le commendataire Francesco Pisani prend alors peur, et remet sa charge à Hippolyte d'Este, cardinal de Ferrare et légat du pape en France, qui prend aussitôt le titre d'abbé de Prémontré. La commende ne cesse pourtant pas, mais le cardinal d'Este permet à l'ordre de retrouver un fonctionnement plus habituel. Le pape Pie IV approuve cette nomination ainsi que le chapitre général de 1564. Gilbert de Tournebulle, abbé de Montcetz, est désigné comme vicaire général pour gouverner l'ordre au nom d'Este. Enfin, en 1573, la commende cesse à Prémontré, avec l'élection de l'abbé général Jean Despruets[20].

Les troubles atteignent la circarie de Hollande en 1580. Guillaume le Taciturne soulève les populations des Pays-Bas contre les Habsbourg, et cette révolte a aussi un caractère religieux marqué, les révoltés prenant cause pour la Réforme dans sa version calviniste. 42 abbayes sont dispersées et détruites, dont Sainte-Marie de Middelbourg, à la bibliothèque réputée dans toute l'Europe. Plusieurs religieux trouvent la mort dans ces épisodes violents, dont les martyrs de Gorcum, et de nombreux autres[31].

Malgré ces siècles difficiles, l'ordre Prémontré continue de produire des intellectuels de valeur, comme l'hélléniste Jean Haberckalt, abbé de Marchtal, les exégètes Guillaume Ulin, Pierre de Herrenthals et Thomas l'Hureux, les historiens Wugenhall et Héthoum de Korikos. L'ordre fonde des collèges auprès des universités de Salamanque en 1568 et de Louvain en 1571. Des évêques réformateurs sortent aussi des rangs de l'ordre, comme Nicolas Psaume, évêque de Verdun, père conciliaire au concile de Trente et ami d'Ignace de Loyola[32].

Les Prémontrés dans la Réforme catholique

Les décrets disciplinaires du concile de Trente s'attaquent vigoureusement à la réforme des ordre religieux, en donnant aux supérieurs et aux évêques les moyens hiérarchiques nécessaire pour ce faire. Nicolas Psaume, religieux prémontré et évêque de Verdun est d'ailleurs l'un des pères conciliaires ayant accordé son attention à la question des ordres religieux.

Lorsque Jean Despruets est élu abbé général en 1573, il trouve un ordre désorganisé par l'absence d'abbé général depuis 32 ans, affaibli par les infidélités à la règle, et l'influence de la Réforme protestante. Sa première action est de mener des visites canoniques en France, Allemagne, et Lorraine, et d'imposer la discipline canoniale dans toutes les abbayes où des déviances sont constatées[33]. Ce mouvement entraîne cependant une certaine fracture de l'unité de l'ordre en congrégations ayant des statuts divers et des observances différentes.

La circarie de Bohême acquiert la première une particularité, une réforme émanant de l'abbaye de Tepla à la fin du XVe siècle influençant notablement les autres abbayes prémontrées de la région. En Rhénanie, un retour à la règle originelle s'opère entre 1540 et 1582 sous l'impulsion de Jacques Panhausen, abbé de Steinfeld[34].

En Espagne, l'ordre résiste à un projet de fusion avec les Hiéronymites porté par le roi Philippe II, et entreprent de se réformer lui-même[35]. De fait, la visite de l'abbé général entre en collision avec cette réforme entamée par Diego de Mendieta, abbé de Saint-Michel de Trevino, et s'inspirant fortement des ordres mendiants. Mendieta supprime l'élection des abbés à vie, ceux-ci n'exerçant désormais leur charge que pendant 3 ans non renouvelables. Un compromis est trouvé, et des statuts propres à la congrégation d'Espagnes sont approuvés en 1580 par Despruets et le pape Grégoire XIII. La circarie d'Espagne est à partir de ce moment gouvernée par un vicaire ayant les mêmes pouvoirs que l'abbé général, et s'abstient de prendre part aux chapitres généraux[36]. La circarie de Hongrie connaît elle aussi un effort de réforme particulier promu par François Fegyverneky, prévôt de l'abbaye de Sag et visiteur général de l'ordre entre 1510 et 1535[35].

En 1582, le même pape Grégoire XIII autorise le culte liturgique de saint Norbert et fixe sa fête au 6 juin. Despruets en compose l'office, qui est approuvé par le chapitre général de 1584. Il se consacre aussi à l'écriture d'opuscules d'apologétique contre les thèses protestantes[37]. En 1627, le corps de saint Norbert est transféré par Johann Lohel depuis Magdebourg, dont l'abbaye est alors tombée aux mains des luthériens, jusqu'en l'abbaye de Strahov sur ordre de l'empereur Ferdinand II[38], qui fournit les saufs-conduits nécessaires à cette mission délicate.

La Lorraine devient un autre foyer de réforme de l'ordre Prémontré avec l'abbé de Sainte-Marie-au-bois, Servais de Lairuelz, initiateur de la « réforme de Lorraine ». Il entraîne dans sa « Congrégation de l'Antique rigueur » une quarantaine d'établissements de prémontrés dont l'abbaye Sainte-Marie-Majeure de Pont-à-Mousson devient l'abbaye mère. L'abbé général Pierre Gosset encourage cette réforme, et, voyant qu'il ne parvient pas lui-même à réformer l'ordre dans son entièreté, obtient du pape Paul V que la nouvelle congrégation soit soustraite à la juridiction du chapitre général, pour être gouverné par un chapitre particulier présidé par l'abbé général[39]. Cette réforme se propage en Lorraine et en Normandie, 42 monastères l'adoptant, comme Etival, Sainte-Odile, Mondaye... Elle s'inspire en grande partie des constitutions de la Compagnie de Jésus, portant atteinte par le fait même à certaines observances de l'ordre Prémontré, comme la stabilité des chanoines dans leur abbaye[40].

Le reste de l'ordre est finalement réformé lorsque le chapitre général de 1630 promulgue une révision des statuts basée sur le texte primitif, augmenté de quantités d'exhortations pieuses[41]. Lorsque l'abbé général Pierre Gosset meurt en 1635, deux chapitres rivaux élisent, l'un Pierre Desban, abbé de Pont-à-Mousson, l'autre le cardinal de Richelieu. Le pape ne confirme ni l'un ni l'autre, et la vacance se prolonge jusqu'à la mort du cardinal en 1642, qui restitue peu avant de mourir les biens spoliés aux Prémontrés[38].

Matthieu Yssrelius, abbé de Saint-Michel d'Anvers, mécène de Rubens, peint par ce dernier.

Lorsque l'abbé général Augustin Le Scellier renonce à sa charge en 1666, il nomme pour successeur Michel de Colbert-Terron, docteur en Sorbonne et parent du ministre Jean-Baptiste Colbert. Cette désignation irrégulière est annulée par le pape Clément IX, avant d'être confirmée sur les instances du roi Louis XIV désirant voir un Colbert abbé général des Prémontrés. Le nouvel abbé est critique pour son train de vie fastueux, et suscite par opposition une réforme austère qui prend sa source à l'abbaye du Mont-Saint-Martin[42]. Le successeur de Colbert, Claude de Muin, est à l'origine d'important travaux de reconstruction de l'abbaye de Prémontré. Il lutte également avec succès contre le jansénisme, qui a peu de partisans dans l'ordre[43].

L'ordre continue d'accorder au XVIIe S une grande importance aux études. En plus de ceux de Louvain et de Salamanque, des collèges universitaires prémontrés sont créés auprès des universités de Rome en 1618, Cologne en 1619, Douai en 1620, et Prague en 1637[44].

L'ordre à l'époque des Lumières

Le XVIIIe s est une période importante pour l'histoire artistique et scientifique de l'ordre, qui participe pleinement au mouvement des Lumières, dans une optique chrétienne. De nombreuses abbayes sont complètement reconstruites dans le style classique qui devient l'une des marques de fabrique des Prémontrés. Celui-ci enfante aussi des artistes de renom, tel le peintre Eustache Restout, chanoine de Mondaye, ou son frère le peintre et graveur Jacques Restout. Ce sont les derniers feux de l'ordre en France avant les grandes difficultés dues à l'institution de la commission des réguliers par le roi Louis XV[45]. Celle-ci supprime d'autorité un certain nombre de monastères, et oblige les Prémontrés du royaume à réviser leurs statuts. Une nouvelle liturgie calquée sur le missel et le bréviaire parisiens est promulguée en 1786, abandonnant le patrimoine liturgique ancien propre à l'ordre, en tout cas en France car les autres circaries refusent ces innovations[46].

Tout au long de ce siècle, la commende continue à impacter négativement l'ordre, un de ses effets étant le petit nombres de chanoines dans chaque abbaye, la portion congrue versée par le commendataire ne suffisant pas à assurer leur subsistance. Prémontré, l'abbaye-mère, n'en compte ainsi que 50 en 1768. Cependant, la discipline et la piété règnent. Augustin Calmet, visiteur de l'ordre au nom du pape, rend témoignage de la ferveur des Prémontrés dans son rapport[47]. L'ordre continue de rayonner intellectuellement, produisant des auteurs de valeur: les historiens Jean Chrysostome Van der Sterre, Jaime Caresmar, Jean Le Paige, Claude de Vertot, Maurice du Pré, Charles-Hyacinthe Hugo... Godefroi Hermans, abbé de Tongerlo, sauve l'oeuvre des Bollandistes en achetant leur bibliothèque en 1788. Des religieux scientifiques s'intéressent à l'astronomie comme Johann Zahn et Benoit Bayes, à la physique comme Procopius Divisch. L'abbé Remacle Lissoir fonde en son abbaye de Laval Dieu une école de musique qui forme notamment le compositeur Méhul. A Strahov en Bohème, les Prémontrés s'intéressent à la facture d'orgue. L'un d'eux, Franz Joseph Oehlschlägel, devient un facteur réputé[48].

Les Prémontrés d'Autriche et des Pays-Bas autrichiens pâtissent quant à eux du joséphisme. Despote éclairé, l'empereur Joseph II impose au clergé ses idées rationalistes et utilitaristes inspirées des Lumières. Il défend aux religieux de ses Etats de communiquer avec leurs supérieurs lorsque ceux-ci sont étrangers, et institue des séminaires généraux où tous les ordres doivent envoyer leurs étudiants. Les abbayes de l'ordre aux Pays-Bas autrichiens refusent, et plusieurs sont mises sous séquestre en guise de représailles. Elles sont également contraintes à se réunir en chapitres nationaux en 1782 et 1786. Les abbayes se trouvant en Bohême se voient interdire de recevoir des novices en 1780, celles d'Autriches sont supprimées en 1782, et celles de Hongrie, reconstituées avec peine après les invasions ottomanes, le sont également entre 1785 et 1787[49].

Les Prémontrés sous la Révolution

Du 13 au 26 février 1790, l'Assemblée Nationale décide l'interdiction des voeux religieux et la dissolution de toutes les communautés existantes. Le 2 novembre suivant, l'abbaye de Prémontré est saisie et la communauté dispersée. Le même sort attend l'ensemble des 92 abbayes prémontrées de France[50]. 1200 religieux sont contraints de les quitter, et pour la plupart restent en charge lorsqu'ils ont une mission pastorale de curé ou de vicaire, tant que le culte est encore autorisé[49].

Lorsque la persécution religieuse s'abat avec plus de vigueur, Jean Guidel, chanoine de Pont-à-Mousson, est guillotiné à Liège en 1793. Le 13 octobre de la même année, Pierre-Adrien Toulorge, chanoine de Blanchelande, subit le même sort à Coutances, suivi en 1794 de Charles Ochin, chanoine de Vicoigne, à Valenciennes. Un grand nombre meurent victime des pontons de Rochefort, et sont inhumés sur les îles Madame, d'Aix, de Ré et d'Oléron. Certains meurent en Guyanne, comme Mansuy Lapostre à Sinnamary, et Jean Venaty à Counamama près d'Iracoubo[47].

Les autres chanoines émigrent ou se cachent. Seuls les religieux de l'abbaye de Cuissy continuent un temps dans la clandestinité à mener une vie conventuelle au village de Trucy, mais n'acceptent pas de novice et finissent par s'éteindre. Les bâtiments claustraux sont affectés à d'autres usages, et pour la plupart en souffrent grandement. L'invasion des Pays-Bas autrichiens par les armées révolutionnaires françaises produit les mêmes effets sur les abbayes s'y trouvant, à des degrés divers. L'abbaye Saint-Nicolas de Furnes souffre le plus, tous ses religieux étant déportés. Les abbayes d'Allemagnes sont quant à elles dispersées après la formation de la Confédération du Rhin, qui adopte la politique hostile de la France à l'égard des ordres religieux[51].

Entre renaissance et nouvelles persécutions

En 1805, il ne reste plus que 15 abbayes en Espagne, 2 en Prusse qui sont bientôt dispersées, et 8 en Autriches, autorisées par l'empereur François II à condition de desservir des paroisses. Dans les autres pays, comme en France, les religieux dispersés maintiennent des liens épistolaires et amicaux, et l'ordre n'est jamais canoniquement aboli[51]. L'abbé général Jean-Baptiste L'Écuy maintient son réseau dans l'espérance d'une renaissance, et il peut autoriser seulement un an avant de mourir, en 1833, les abbayes belges tout juste refondées d'Averbode, de Parc, de Tongerlo, de Grimbergen et de Postel, à recevoir de nouveaux des novices. Cette renaissance est permise par la Révolution belge de 1830 qui libère l'Eglise de la tutelle d'un monarque protestant. Dernier abbé général d'Ancien Régime, L'Ecuy meurt le 22 avril 1834, laissant la charge vacante[52].

Malgré l'absence d'un abbé général, l'ordre perdure, et parvient à refonder des maisons en France: L'abbaye Saint-Michel de Frigolet est fondée en 1858 par Edmond Boulbon, celle de Saint-Martin de Mondaye par des religieux venus de Grimbergen sous la férule de Joseph Willekens. En 1873, les Prémontrés s'établissent à l'abbaye de Conques, et à Saint-Jean-de-Côle en 1877. Des communautés féminines sont implantées à Sainte-Anne-de-Bonlieu en 1866 et au Mesnil-Saint-Denis en 1889[53].

En 1868, l'abbé de Strahov, Jérôme Zeidler, réunit un chapitre général afin de faire élire un abbé général qui puisse représenter les Prémontrés au premier concile du Vatican. Il est lui-même élu, mais meurt avant de recevoir confirmation du Saint-Siège. Il faut attendre 1883 pour que soit élu Sigismond Stary, abbé de Strahov, et que reprenne la succession des abbés généraux[54].

Le 29 mars 1880, le président Jules Grévy signe les décrets inaugurant la politique anticongréganiste de la IIIe République. Les Prémontrés résistent à leur expulsion, et la presse de l'époque peut parler d'un véritable "siège de Frigolet" du 3 au 7 novembre 1880. Le 4 novembre de la même année, la communauté de Mondaye est expulsée à son tour[55]. Certains reviennent discrètement, pour être de nouveaux touchés par les expulsions liées au dispositions propres concernant les congrégations religieuses contenues dans la loi sur les associations en 1901. Les moniales de Bonlieu trouvent alors refuge à Grimbergen jusqu'en 1933, les chanoines de Frigolet à Leffe jusqu'en 1920, et ceux de Mondaye en l'abbaye de Bois-Seigneur-Isaac jusqu'en 1921. L'apaisement de l'après-guerre permet alors aux communautés chassées de retrouver discrètement leurs monastères, sans pour autant recevoir de statut légal[56].

Au XXe siècle, ce sont les communautés d'Europe centrale qui souffrent du nazisme et du communisme. Les abbayes de Nova Rise et Zeliv, en Tchécoslovaquie, sont supprimées en 1941 par les autorités d'occupation allemandes. Les autres abbayes tchèques, dont Tepla, celles de Hongrie et de Roumanie sont supprimées par les différents régimes communistes qui s'emparent du pouvoir à la faveur de l'occupation soviétique de ces nations[57].

Les Prémontrés hors d'Europe

Abbaye de West de Pere (Wisconsin). Mission de Uélé (Congo) et Vatomandry (Madagascar). Mission au Kerala de Tepla.

Charisme et spiritualité

Organisation interne

L'ordre aujourd'hui

Couvents de femme (Norbertines) soit rattachés à une abbaye de Prémontrés, soit subordonnées à l'évêque du diocèse.

Prémontrés notables

Saints

Bienheureux



Norbert y installe une communauté de chanoines réguliers, soumis à la règle de saint Augustin, ainsi qu'une communauté de femmes. Plus tard ces chanoines réguliers seront appelés Prémontrés ou Norbertins. Dès l'origine, les prémontrés ont une structure triple : un ordre d'hommes, un ordre de femmes et un tiers-ordre, ajouté en 1122 par Norbert, de laïcs voulant s'associer à la spiritualité de l'ordre.

Les prémontrés ont une double mission : l'apostolat, en tant que clercs, c'est-à-dire l'action auprès des fidèles dans les paroisses, et l'Office divin, comme les moines. Cette double mission répond à la devise augustine sanctitatem et clericatum (de sainteté et d'apostolat). Ils sont parfois considérés comme des précurseurs des ordres mendiants[58].

L'ordre des prémontrés a eu un rite liturgique propre entre le XIIe siècle et 1970 : le rite prémontré.

En 1130, les prémontrés sont déjà cinq cents frères et plus de mille religieuses. Quatre ans plus tard, Norbert meurt.

Abbaye de Pont-à-Mousson (duché de Bar).


À Haguenau (Alsace), notamment, après l'occupation de la ville par les troupes françaises en 1635, les prémontrés du monastère d'Allerheiligen en Forêt-Noire, rachètent l'église et le couvent et reprennent leur service à l'église Saint-Nicolas ; ils la conserveront jusqu'à la Révolution française de 1789.

À la Révolution française la plupart des abbayes disparaissent ; comme les autres religieux, les prémontrés doivent quitter leurs abbayes. Leurs biens sont confisqués et vendus comme « biens nationaux ». Certains s'exilent, d'autres deviennent curés de paroisse.

En 1858, la restauration de l'ordre en France a eu lieu à Frigolet en Provence grâce au Père Edmond Boulbon, puis à Mondaye en Normandie grâce à la venue de chanoines de l'abbaye de Grimbergen. Après les lois d'expulsion du début du siècle, les prémontrés sont de retour dans les abbayes en 1921.


  • François Petit, L'ordre de Prémontré, Paris, Letouzey et Ané,
  • François Petit, Norbert et l'origine des Prémontrés, Paris, Le Cerf, (ISBN 2-204-01694-2)
  • Robert Serrou et Pierre Vals, Les Prémontrés chez les Pères blancs de Frigolet, Paris, Pierre Horay,