Grande Fugue

quatuor de Ludwig van Beethoven

La Grande Fugue en si bémol majeur pour quatuor à cordes, opus 133, de Ludwig van Beethoven, fut composée entre 1824 et 1825[1] en tant que dernier mouvement du Quatuor op. 130, puis détachée de cette œuvre pour être publiée séparément en mai 1827[1].

Grande Fugue
en si bémol majeur
Opus 133
Image illustrative de l’article Grande Fugue
Ludwig van Beethoven en 1824.

GenreQuatuor à cordes
Nb. de mouvements1
MusiqueLudwig van Beethoven
Effectif2 violons, 1 alto, 1 violoncelle
Durée approximativeenviron 15 minutes
Dates de compositionentre 1824 et 1825
DédicataireArchiduc Rodolphe d'Autriche
Partition autographeJuilliard School
Création
Drapeau de l'Autriche Vienne, Autriche
InterprètesSchuppanzigh et son quatuor
Versions successives
  • transcription pour piano à quatre mains, op. 134

Œuvre visionnaire, monumentale dans ses dimensions et dans sa puissance expressive, elle est considérée comme le couronnement de l'œuvre pour quatuor de Beethoven[2].

Contexte

La Grande Fugue est une des toutes dernières œuvres de Beethoven. Seuls les Quatuors op. 131 et op. 135 lui furent postérieurs. Elle était donc au départ le sixième et dernier mouvement du Treizième Quatuor, où elle succédait à la douloureuse cavatine. Beethoven estimait beaucoup sa fugue, à propos de laquelle il avait confié à son ami le violoniste Holz : « Ce n'est pas de l'art que de faire une fugue : j'en ai fait par douzaines, à l'époque de mes études. Mais l'imagination réclame aussi ses droits ; et aujourd'hui, il faut qu'un autre esprit, véritablement poétique, entre dans la forme antique »[1]. Le quatuor fut créé par le quatuor Schuppanzigh le . Seuls les deuxième et quatrième mouvements furent applaudis et bissés. Beethoven se faisant rapporter la scène entra en rage et déclara : « Les bœufs ! Les ânes ! oui, ces friandises ! ils se les font resservir encore une fois ! Pourquoi pas plutôt la fugue ? Elle seule aurait dû être rejouée. »[3],[4]

Pourtant ses dimensions hors du commun, la virtuosité qu'elle exigeait des exécutants de l'époque et l'accueil glacial du public conduisirent l'éditeur Artaria à réclamer que la fugue soit séparée du quatuor et publiée à part. Beethoven qui n'avait jamais eu pour habitude de se soucier des caprices du public ni des doléances des instrumentistes ne s'exécuta qu'à grand regret. Il composa à l'automne de 1826 un finale de substitution pour le Treizième Quatuor — un Allegro ne manquant pas d'intérêt, mais incomparablement plus léger que le finale initial. Ce fut son ultime œuvre achevée.

La Grande Fugue fut publiée, après la mort de Beethoven, en partition séparée en mai 1827[5] chez Mathias Artaria à Vienne avec une dédicace à l'Archiduc Rodolphe d'Autriche[5].

La Grande Fugue et la critique

Au cours du XIXe siècle l'œuvre fut à peine mieux appréciée. Daniel Gregory Mason la jugea « repoussante » tandis que Louis Spohr parla d'une « horreur indéchiffrable ». Il fallut attendre le début du XXe siècle pour que cette œuvre soit enfin reconnue comme pièce majeure. Igor Stravinsky qui n'avait pas toujours aimé Beethoven déclara à la fin de sa vie y voir « une œuvre immortelle et à jamais contemporaine ». Aujourd'hui peu de spécialistes contestent qu'il s'agit d'une des plus grandes réalisations de Beethoven.

Musique

La Grande Fugue est une démonstration des procédés expérimentés par Beethoven dans sa dernière période créatrice. Ainsi elle combine la forme sonate, le style fugué et la variation ; elle partage avec le finale de la Neuvième Symphonie la particularité de contenir plusieurs sections, comme autant de mouvements à l'intérieur d'un unique grand mouvement ; chaque section est construite sur une transformation du thème initial.

Sa durée d’exécution est d'environ 15 minutes[6].

Structure

De par ses dimensions monumentales, ses fréquents changements de tonalités et de thèmes, l'œuvre, bien que n'étant constituée que d'un seul mouvement, peut être analysée comme une synthèse de la forme sonate bithématique de la seconde moitié du XVIIIe siècle, du thème et variations ainsi que de la forme symphonique classique :

Forme « symphonie »IntroductionAllegroAdagioScherzo, Finale
Forme sonateExpositionDéveloppementRéexposition[7]Coda
Thème AThème BPont
Mesures1 — 3031 — 158159 — 232233 — 272273 — 492493 — 532533 — 657658 — 662663 — 741
TonalitésSol – Si Si – Mi – Rém – Dom – Si Sol – Ré – Sol Si La – Si m – Fam – Mi m – La La – FaSi Si
Mesure







Thèmes

L'œuvre débute sur une ouverture lente de 30 mesures qui commence par une unisson forte de toutes les voix sur sol. Le thème principal de la fugue à suivre, introduit en sol majeur puis en si bémol majeur, est immédiatement énoncé dans trois variations rythmiques différentes. Ce motif est constitué de huit notes qui montent chromatiquement. Il n'est pas sans rappeler le sujet de la fugue en si mineur de Jean-Sébastien Bach.

En constraste frappant avec ce court motif chromatique, le deuxième thème de la fugue s'élance dans de grands intervalles de dixièmes et douxièmes dans une rythmique moderne élaborée :

Un troisième motif en sol bémol majeur, noté Thème B sur le tableau ci-dessus et apparaissant mesure 159, est constitué uniquement de doubles-croches et signe le retour au calme à la suite de la première section fuguée :

Adaptations

L'archiduc Rodolphe d'Autriche, dédicataire de la Grande fugue op.133
  • Quand Beethoven eut accepté de séparer la Grande Fugue du 13e quatuor, son éditeur Artaria lui proposa de publier en même temps que le quatuor une transcription pour piano à quatre mains de la Grande fugue. En avril 1826, Beethoven confia cette tâche à Anton Halm[1],[8]. Mécontent du résultat, il refit le travail lui-même début septembre 1826. Elle sera publiée en mai 1827 sous le numéro d'opus 134[9]. Cette version est très rarement jouée.
  • P. D. Q. Bach en a tiré une version parodique, Grossest Fugue (la fugue la plus vulgaire, en anglais).

La redécouverte du manuscrit

Le [10], un manuscrit original comportant 80 pages de la Grande Fugue (la version transcrite par Beethoven pour piano à quatre mains et publiée sous l'opus 134) a été vendu à Londres par la maison Sotheby's pour 1,13 million de livres (1,6 million d'euros). Cela faisait 115 ans que cette partition avait disparu. L'acheteur est Bruce Kovner, un multimilliardaire qui en a fait don, ainsi que de 139 autres partitions originales et rares, à la Juilliard School en février 2006. Le manuscrit avait été retrouvé dans les caves du Séminaire théologique Palmer, à Philadelphie (USA) en juillet 2005.

Repères discographiques

Bibliographie

Références

Liens externes

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