Codex Chantilly

manuscrit musical enluminé du XIVe siècle, appartenant au style de l'ars subtilior

Le Codex Chantilly est un manuscrit du XIVe siècle regroupant des pièces musicales dans le style de l'ars subtilior ou art plus subtil, un style de la musique du Moyen Âge de la fin du XIVe siècle, située entre l'ars nova (1310-1377) et l'école franco-flamande (1420-1600). Le manuscrit est conservé à la bibliothèque du château de Chantilly (sous la cote MS 0564). Il contient 112 pièces de compositeurs représentatifs de cette école, parmi lesquels Baude Cordier, Trebor, Jacob Senleches ou Solage.

Codex Chantilly
La chanson Belle, Bonne, Sage (folio 11 verso) de Baude Cordier, notée de façon à représenter un cœur. En rouge, certaines notes qui indiquent un changement de temps et un autre cœur.
Format
Langues
Date de création
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Lieu
Collection
Tout par compas suy composés (folio 12). Canon circulaire de Baude Cordier[1].
Le folio 43, sur lequel figure la ballade à trois voix, Se Jufy César, Rolant et roy Artus de Trebor du Codex Chantilly au musée Condé. La portée est à six lignes. Les notes rouges indiquent le tempo.
Le folio 13v, un virelai anonyme Un orible plein/Adieu vos comant du Codex Chantilly au musée Condé.
Partition de La Harpe de mélodie de Jacob Senleches (manuscrit aujourd'hui à Chicago, Newberry Library, US-Cn 54.1, folio 10). La partition est présente dans le Codex Chantilly (folio 43 verso), mais sous forme linéaire.

La plupart des compositions du Codex datent d'environ 1350-1400. Les 112 pièces, pour l'essentiel de compositeurs français, sont toutes polyphoniques (3 ou 4 voix). Le codex contient de nombreux exemples des chansons de cour les plus répandues de son temps, comme les ballades, rondeaux, virelais et motets isorythmiques.Parmi les motets, certains ont un rythme extrêmement complexe, et sont écrits dans une notation musicale elle-même compliquée. Deux pièces de Baude Cordier ont été ajoutées un peu plus tardivement en tête du manuscrit, et leur forme inhabituelle reflète leur contenu musical.

Ce manuscrit est l'une des principales sources de l'ars subtilior, avec notamment le Codex Modena.

Description

Contrairement aux usages de l'époque – et même du siècle suivant – le Codex Chantilly contient des œuvres de compositeurs nommés en abondance et ne laisse que 34 pièces anonymes. Les 34 auteurs cités sont : Baude Cordier, Johannes Haucourt, Matheus de Sancto Johanne, Petrus Fabri, Jacob Senleches, Jehan Vaillant, Solage, Guillaume de Machaut, Grimace, Magister Franciscus, Trebor, Magister Egidius Augustinus, Guido, Johannes Susay, Johannes Olivier, Philippus de Caserte, Johannes Galiot, Jehan Simon Hasprois, Garinus, Johannes Cuvelier, Goscalch, Taillandier, Hymbert de Salinis, Johannes Cesaris, Rodericus, Johannes de Meruco, F. Andrieu, Pierre des Molins, Borlet, Pykini, Gacian Reyneau, Egidius de Pusiex, Philippe Royllart, J. Alanus.

Le manuscrit est célèbre et connu pour la notation extrêmement compliquée de l'ars subtilior, mais il est aussi admiré pour l'aspect décoratif de certaines de ses pages. Il comprend, dans les cinq fascicules du corpus d'origine, 99 chansons (soixante-dix ballades, dix-sept rondeaux, douze virelais), et 13 motets isorythmiques, tous de la deuxième moitié du XIVe siècle. Une pièce de Solage, Très gentil cuer amoureux, est notée deux fois (n°13 et n°81). Quelques-unes des pièces, plus simples, sont de Guillaume de Machaut ou de ses contemporains, alors que les œuvres les plus complexes sont par de musiciens anonymes, ou de compositeurs nommés, de la génération suivante, identifiés au service de la cour de Foix et Aragon, du Palais des papes d'Avignon, ou du Duc de Berry.

La copie

Le nombre important d'erreurs dans le texte français, et de fautes dans la recopie des partitions conduisent à la conclusion que les cinq fascicules du corpus ont été copiés de l'original français à portée de cinq lignes par un copiste italien qui ne comprenait pas ce qu'il copiait. Les textes ont été copiés d'abord, puis la musique, ce qui explique les décalages par rapport à la musique. Le manuscrit n'a pas été achevé : la place des initiales, qui devait être ensuite confiée à l'enlumineur, est presque partout restée en blanc.

La provenance d'une copie italienne d'un original français, est étayée par une inscription sur la page de titre du manuscrit qui statue qu'en 1461 le livre a appartenu à la famille florentine de Francesco d'Altobianco Alberti (it) qui, bannie de Florence en 1401, a vécu pendant longtemps en France[2],[3].

Le cas Baude Cordier

Maistre Baude Cordier est de Reims comme Machaut, mais son identité n'est pas encore sûre et les conjectures posent encore questions. Il est un des prédécesseurs de Dufay. Les deux compositions, sont stylistiquement et, dans leur technique de notation, d'une période légèrement plus tardive. Elles sont dédicacées à une dame et à un seigneur.

La première écrite dans la forme d'un cœur. « Les premières lettres de chacun des quatre premiers vers forment en acrostiche le nom de Baude[4]. » L'autre sur un cercle, est un canon de 33 mesures. Elizabeth Randell Upton remarque avec pertinence que les deux pages de Cordier sont celles qui sont le plus reproduites, mais qu'ironiquement elles n'appartiennent pas au manuscrit original[5]. Les deux pages ne sont pas sur le même folio, mais chacune sur une feuille. Elles sont placées, comme la table des matières – où elles n'apparaissent pas – en avant de l'ancien corpus, à la place du premier fascicule du manuscrit original qui est perdu. Autre point important : ce sont les deux seules pièces de musiques écrites dans le système français d'une portée à cinq lignes, alors que toutes les autres sont sur une portée à six lignes comme on les trouve habituellement dans les manuscrits italiens. La date de l'ajout est inconnu et la main, communes aux deux, est en revanche différente du corpus.

Les dessins

Deux dessins à la plume ont été tracés sur les folios 25 et 37[6]. Ils sont situés sur les belles pages d'un nouveau cahier. Folio 25, est représenté un D où figurent deux dragons. Folio 37, un L où un monstre s'y enroule, occupe toute la marge de gauche. En bas de la page, deux groupes de quatre moines chanteurs sont dessinés. La date de la réalisation est plus tardive, et selon les experts[7] située vers le début du XVe ou plus. Upton rappelle que ces dessins n'ont pas à être rapprochés du plan original du manuscrit, ni des œuvres qui les portent.

La découverte

Quatre cents ans exactement après Alberti, en 1861, Henry de Triqueti, sculpteur et amateur éclairé, trouve ce volume à Florence, chez M. Bigazzi, secrétaire de l'Accademia della Crusca, et l'achète pour la bibliothèque. Le manuscrit était en feuilles ; Triqueti l'a orné d'un frontispice[3].

Format

Le manuscrit est en vélin, les feuilles sont de 38,7 cm sur 28,6 cm. Sans compter les feuillets ajoutés en 1880 au moment de la reliure et qui contiennent le frontispice et une table, ce volume est constitué de 64 folios de parchemin, à savoir 4 folios préliminaires qui n'avaient pas été compris dans la pagination primitive (aujourd'hui cotés 9-12), et 60 feuilles cotés 13-72 (en chiffres romains). La disparition des feuillets 1-12 est ancienne, puisqu'une table ajoutée au commencement, en caractères du XVe siècle, ne s'applique qu'au contenu des feuillets 13-72.

Contenu

Pour rappel, la structure des genres, du simple au complexe, est le suivant :

  • Virelai : A bba A...
  • Rondeau : AB aA ab AB
  • Ballade : 3 strophes de forme aab. La forme est simple mais les œuvres qui l'utilisent sont d'une écriture complexe. C'est le genre dominant du XIVe. Ces trois genres représentent 99 titres.
  • Motet (13) : est construit sur la voix inférieure, fragment de plain-chant répété tout le long du morceau — d'où les termes d'isorythmique et de teneur. Sur cette voix, se superposent les autres plus ornées et au(x) texte(s) différent(s), en glosant la teneur.
Contenu du Codex Chantilly
auteurnofoliogenreincipitvoixnote
Baude Cordierno 1fo 11vrondeauBelle, bonne, sage, plaisant et gente3 voix(cf. Illustration)
Baude Cordierno 2fo 12rondeauTout par compas suy composée3 voix (2 écrites plus troisième en canon)Le cercle est constitué de 33 mesures. cf. illustration
Borletno 89fo 54vvirelaiHé, très doulz roussignol joly4 voixBorlet est l'anagramme de Trébol, un compositeur français au service de Martin V d'Aragon en 1409. La pièce est en imitation d'oiseau, genre à succès de l'époque.
Magister Egidiusno 21fo 22balladeRoses et lis ay veu en une flour3 voixMagister Egidius Augustinus.
F[ranciscus] Andrieuno 84fo 52balladeArmes, amours, dames, chevalerie/O flour4 voixc. 1377. Ballade du poète Eustache Deschamps, sur la mort de Guillaume de Machaut. Deschamps est un élève de Machaut. Il s'agit de l'une des premières déplorations connue. Elle cite la messe mariale de Machaut (Gloria et Credo) sur les mots La mort Machaut. Il est possible qu'Andrieu soit le même que le Magister Franciscus des no 16 et 18[8].
Magister Franciscusno 16fo 19vballadeDe Narcissus, home très ourguilleus[9]3 voix
Magister Franciscusno 18fo 20vballadePhiton, Phiton, beste très venimeuse[10]3 voixCite texte et musique de la ballade de Machaut « Phiton le mervilleus serpent », mais en remanie le texte pour évoquer l'ennemi de Fébus, surnom de Gaston III de Foix-Béarn.
Gacian Reyneauno 93fo 56vrondeauVa t en mon cuer aveuc mes yeux[11]3 voixUne quatrième voix se trouve dans le codex Reina.
Garinusno 51fo 36vrondeauLoyauté me tient en espoir[12]3 voixCe petit rondeau figure exceptionnellement sur la même page que le 52.
Goscalchno 58fo 39vballadeEn nul estât n'a si grant fermeté[13]3 voixL'auteur n'est connu que par cette pièce.
Grimace ou Grymaceno 15fo 19balladeSe Zephirus, Phebus et leur lingnie/Se Jupiter, qui donna seigneurie3 voixLe compositeur est en connexion avec Avignon. On connaît de lui 3 ballades (le 15 et le 86), un rondeau et un virelai (91).
Grimace ou Grymaceno 86fo 53balladeDes qu buisson me fu boutez d'enfance4 voix
Grimace ou Grymaceno 91fo 55vvirelaiAlarme, alarme, sans séjour4 voixFigure aussi dans le codex Reina.
Guidono 27fo 25rondeauDieux gart qui bien le chantera[14]3 voixCet auteur est identifié avec Guido de Lange chanteur à la chapelle papale d'Avignon, et présent avant le schisme. Les deux pièces du codex, seules œuvres connues, semblent être datées du début de l'Ars Subtilior « car leurs textes ironisants témoignent du point de vue du style et de la notation, de voies nouvelles qui se détournent des vieux modèles[4] ». Mais la musique utilise les mêmes procédés dont le texte se plaint[15].
Guidono 28fo 25vballadeOr voit tout en aventure[16]3 voix
Guidono 29fo 25vrondeauRobin muse, muse, muse/Je ne say fere fuszee[17]3 voixLe nom de l'auteur apparaît dans la partie de ténor. Pas d'autre source. Ce petit rondeau figure exceptionnellement sur la même page que le 28.
[Guillaume de Machaut]no 14fo 18vballadeDe petit peu devient voulenté3 voixVoici le plus vieux compositeur représenté, Machaut (mort en 1377). Cette ballade figure dans une dizaine de manuscrits musicaux et quatre de poésies, principalement d'origine italienne[15].
[Guillaume de Machaut]no 78fo 49balladeDe fortune me doi plaindre4 voix
Guillaume de Machautno 88fo 54balladeQuant Theseus, Hercules et Jason/Ne quier veoir4 voix
Hymbert de Salinisno 72fo 46balladeEn la saison que toute ries s'encline3 voixSur des vers de Jean Cuvelier. Dans le texte figure le nom et les armes d'Olivier du Guesclin. Dans le texte apparaît dans la partie ténor, Jo. Cunelier. Pas d'autre source.
Jacob de Senlechesno 11fo 17balladeFuions de ci, fuions, povre compaingns3 voix1382 ou après. La date est celle de la mort d'Éléonore d'Aragon, reine de Castille[18], ce qui est un des seuls éléments biographique de l'auteur connu. Senleches est présumé être le harpiste (juglar de harpa) de la reine Éléonore de Castille (voir 67)[19]. En 1383, il est documenté au service sur Cardinal Pedro de Luna, futur antipape Benoît XIII d'Avignon. On recense quatre ballades et deux virelais. Dans le virelais Tel me voit, il rend hommage à Guido, ce qui laisse penser qu'il en fut un élève.
Jacob de Senlechesno 67fo 43vvirelaiLa harpe de mellodie[20]3 voix (2 écrites plus troisième en canon)Greene[21] suggère que l'ajout du nom de Senleches est de la main de Baude Cordier, auteur des célèbres pages collées avant le début du corpus, mais selon Upton[22] il n'y a pas de preuve certaine de cette suggestion. Le virelais remarquablement compliqué, est écrit sur une portée à neuf lignes et fut « très admiré par les contemporains ». Voyez le manuscrit de la Newberry Library 54.1, fo 10, reproduit en illustration.
Jo. de alte curieno 8fo 15vrondeauSe doit il plus en biau semblant fier3 voix
Jacomino 69fo 44vballadeJe me merveil aucune fois comment/J’ay plusieurs fois[23]3 voixLa ballade « fulmine contre le dilettantisme musical » : la composition accumule les subtilités de notation. Le refrains est un canon, mais le compositeur écrit la même musique avec deux systèmes de notation différent[8].
Johannes Aleyn (Alanus)no 111fo 70v-71motetSub Arturo plebs/Fons citharizantium/[In omnem terram]3 voixc. 1358. Le motet, longtemps classé dans les anonymes, est écrit pour la célébration du 23 avril 1358 de la victoire de Poitiers. Alanus, d'origine anglaise est mort en 1373. Le texte le cite à la fin.
Johannes Cesarissno 73fo 46vballadeLa dieus d'amours, sires de vrais amans3 voixLe nom de l'auteur est copié dans la partie de ténor. Pas d'autre source.
Johannes Cunelierno 55fo 38balladeSe Galaas et le puissant Artus3 voixGénéralement connu sous le nom de Jean [ou Jacquemart le] Cuvelier (de Tournais) et faiseur de Charles V. Il est l'auteur d'une chronique de Bertrand du Guesclin, datée de 1387. À Gaston III « Fébus » (1331–1391), comte de Foix.
Johannes Cunelierno 61fo 40vballadeLorques, Arthus, Alixandre et Paris3 voix
Johannes Cunelierno 63fo 41vballadeSe Geneive, Tristan, Yssout, Helainne3 voix
Johannes Galiotno 45fo 33vballadeEn atendant souffrir m'estruet grief payne3 voixGaliot, actif à la fin du XIVe, est l'un des derniers représentant de l'ars subtilior. On ne connaît rien de sa vie et même son identité est mystérieuse.
Johannes Galiotno 53fo 37balladeLe sault périlleux a l'aventure prins3 voixSelon un manuscrit hébreu du début du XVe, cette ballade a eu une énorme influence sur la culture musicale d'avant 1400 à Paris[8].
Johannes Galiotno 59fo 40balladeEn attendant d'amer [avoir] la douce vie3 voix
Johannes Galiotno 68fo 44balladeEn attendant espérance conforte[24]3 voix
Johannes de Merucono 83fo 51vballadeDe home vray a mon jugement[25]4 voixL'auteur français est inconnu, mais sa musique aux rythmes complexes est typique du genre des compositeurs de la cour d'Avignon.
Johannes Olivierno 41fo 31vballadeSi con cy gist mon cuer en grief martire3 voixLe compositeur français, n'est connu que par cette pièce à la complexité rythmique qui utilise des trois pour quatre et des neuf pour six. Autre élément remarquable, le texte donne des instructions sur la manière d'interpréter la musique : « Des trois pars, fais deux ; laisse la moicture / De tamps parfayt, sur ce point je t'avis : / Partis a quart, la quarte part ravis, etc. »
Johannes Simonis de Haspre ou Ja. de Noyonno 46fo 34balladeMa douce amour, je me doy ben conplaindre3 voix
Johannes Simonis de Haspre ou Ja. de Noyonno 47fo 34vballadePuisque je sui fumeux plains de fumée3 voix (2 écrites plus troisième en canon)L'attribution « Hasprois » est ajoutée.
Johannes Susay ou Suzoyno 39fo 30vballadePictagoras, Jabol et Orpheus[26]3 voixLe français Suzoy, qui doit beaucoup à Machaut, a laissé les trois ballades dans le codex et un Gloria. Ses pièces figurent parmi les plus complexes de l'ars subtilior.
Johannes Susay ou Suzoyno 49fo 35vballadeProphilias, un des nobles de Roume[27]3 voix
Johannes Susay ou Suzoyno 85fo 52vballadeA l'arbre sec puis estre comparé[28]4 voix
Johannes Vaillantno 12fo 17vrondeauTrès doulz amis, tout ce que proumis t'ay[29]3 voixJean Vaillant est cité dans un traité anonyme de théorie poétique, Règle de la Seconde Rhétorique comme poète et maître de chant d'une école de musique à Paris. Un autre traité de théorie musicale, ajoute qu'il a enseigné l'harmonie avec « Le sault perilleux » de Johannes Galiot qui figure en 53. Il est donc parmi les plus anciens du recueil.
Johannes Vaillantno 30fo 26rondeauPour ce que je ne say gairez[30]3 voix (2 écrites plus troisième en canon)
Johannes Vaillantno 31fo 26vrondeauDame doucement trait/Doulz amis[31]3 voix1369. Cette date confirme que cet auteur est parmi les plus vieux du recueil, après Machaut.
Johannes Vaillantno 32fo 27balladeOncques Jacob por la belle Rachel[32]3 voix
Johannes Vaillantno 100fo 60virelaiPar maintes foys ay oy recorder[33]3 voix
Matheus de Sancto Johanneno 9fo 16rondeauJe chante ung chant en merencoliant[34]3 voix
Matheus de Sancto Johanneno 48fo 35balladeSanz vous ne puis, très douce créature[35]3 voix
Matheus de Sancto Johanneno 94fo 57balladeScience n’a nul ennemi4 voix
Matheus de Sancto Johanneno 99fo 59vrondeauFortune faulce, parverse[36]4 voix
Mayhuet de Joanno 62fo 41balladeInclite flos orti Gebennensis[37]3 voixAuteur peut être identique à Matheus de Sancto Johanne (cf. 10, 49, 93 & 98). Mayhuet est l'un des chapelains privés du pape Clément dans les années 1380. La ballade, dédiée au Pape, fait allusion aux origines genevoise de Clément et sur la partie de ténor est indiquée pro papa Clemente. En laissant la forme fixe de la ballade et en considérant son but, Inclite flos pourrait être classé comme motet[38].
Pierre des Molinsno 87fo 53vballadeDe ce que foul pensé souvent remaynt[39]3 voixUne quatrième voix se trouve dans le codex Reina. L'auteur n'est connu que par deux pièces, l'autre étant « Amis tout dous vis » qui apparaît aussi en version instrumentale deux fois.
Petrus Fabrino 10fo 16vvirelaiLaus detur multipharia[40]4 voixPièce en l'honneur de sainte Catherine (de Sienne), qui implora le pape Grégoire de retourner à Rome (1376). Le nom de l'auteur apparaît à la fin.
Philippus de Caserteno 42fo 32balladeDe ma dolour ne puis trouver confort[41]3 voixPhilippus de Caserte ou Caserta, Philippot, Philipoctus, un compositeur italien, né à Caserte près de Naples.
Philippus de Caserteno 54fo 37vballadePar le grant senz d'Adriane la sage[42]3 voix
Philippus de Caserteno 56fo 38vballadeIl n'est nulz homs en ce monde vivant[43]3 voix
Philippus de Caserteno 57fo 39balladeEn remirant vo douce pourtraiture[44]3 voix
Philippus de Caserteno 71fo 45vballadePar les bons Gedeon et Sanson delivre3 voixLa pièce nomme explicitement le pape Clément VII, Le pape souverain appelé Clément.
Pykyni ou Pykinino 90fo 55virelaiPlaysance or tost aeuz vous4 voixLe nom est peut-être la corruption de Picquigny, non loin d'Amiens. Pykini est peut-être le même que Robert de Picquigny, chamberlain de Charles II de Navarre.
Henricus Egidius de Pusiexno 102fos 61v-62motetYda Capillorum/Ante thorum trinitatis/Porcio nature4 voix
Philippus Royllartno 106fos 65v-66motetRex Karole, Johannis genite/Leticie, pacis, concordie4 voixRex Karole (vocatif de Karolus variante de Carolus), c'est-à-dire Charles V.
S. Uciredorno 77fo 48vballadeAngelorum psalat tripudium3 voix (2 écrites plus troisième en canon)
[Solage]no 13fo 18virelaiTrès gentil cuer amoureux, attraians[45]3 voixcf. 81
Solageno 17fo 20balladeEn l'amoureux vergier vis una flour[46]3 voixc. 1389. L'auteur est le plus représenté dans le manuscrit (10 attributions plus deux fortement possibles). Il est peut-être originaire d'Auvergne où se trouvent de nombreux villages du nom de « Soulage »[15]. La pièce est signée d'un rébus musical sur son nom : sol-Age. La question reste ouverte de savoir s'il s'agit d'un nom véritable ou d'une anagramme (comme Trebor).
Solageno 24fo 23vballadeCorps femenin par vertu de nature[47]3 voix
Solageno 50fo 36balladeS'aincy estoit que ne feust la noblesce[48]3 voixÉloge de Jean, duc de Berry, explicitement cité : « le bon et gentil Jean, duc de Berry » et le qualifie de « fleur du monde » expression concluant le 17. Peut être une pièce datée du mariage du duc en 1389, comme le 17.
Solageno 79fo 49vballadeLe basile de sa propre nature[49]4 voix
Solageno 80fo 50balladeCalextone, qui fut dame d'Arouse[50]3 voixLes vers du poème (ainsi que celui de Corps feminin, no 24) forment en acrostiche le nom de Cathelline, allusion à la sœur du roi Charles VI et première épouse de Jean de Berry en 1386.
Solageno 81fo 50vvirelaiTrès gentil cuer amoureux, attraians[51]3 voixcf. 13. La quatrième voix qui explique la copie, n'a jamais été ajoutée.
Solageno 95fo 57vballadeHelas ! Je voy mon cuer a fin venir[52]4 voix
Solageno 96fo 58balladePluseurs gens voy qui leur pensée[53]4 voix
Solageno 97fo 58vvirelaiJoieux de cuer en seumellant estoye[54]4 voix
Solageno 98fo 59rondeauFumeux fume par fumée[55]3 voixSolage pourrait avoir fait partie des Fumeux (Jean Fumeux), des bohémiens habillés de façon extravagante[4] (cf. aussi Hasprois 47).
Taillandierno 65fo 42vballadeSe Dedalus an sa gaye mestrie[56]3 voix
[Johan Robert] Treborno 19fo 21balladePasserose de beauté la noble flour[57]3 voix
[Johan Robert] Treborno 20fo 21vballadeEn seumeillant m'avint une vesion[58]3 voix
[Johan Robert Trebor]no 38fo 30balladeSe Alixandre et Hector fussent en vie[59]3 voixÀ Gaston Fébus, comte de Foix. Deux lignes manquent dans le manuscrit et ont été rendus par Green.
[Johan Robert] Treborno 40fo 31balladeQuant joyne cuer en may est amoureux[60]3 voixÀ Gaston Fébus, comte de Foix.
[Johan Robert] Treborno 64fo 42balladeHélas, pitié envers moy dort si fort[61]3 voix
[Johan Robert] Treborno 66fo 43balladeSe Jufy César, Rolant et roy Artus[62]3 voixÀ Gaston Fébus, comte de Foix. (cf. Illustration)
anonymeno 3fo 13balladeToute clarté m'est obscure[63]3 voixCe folio 13 est la première page du manuscrit, tel qu'il a subsisté. La figuration du monde inversé paraît dans la musique où la voix aiguë descend de près d'une octave, alors que le ténor monte au-dessus.
anonymeno 4fo 13vvirelaiUn crible plein d'eau... de vray confort/Adieu vos comant[64]3 voixLa pièce par le cantus s'en prend aux pièges du mariage, pendant que le contreténor s'agite en rythmes syncopés « illustre les terribles conflits » du texte[8]. Cf. illustration
anonymeno 5fo 14virelaiTrès douce playsant figure[65]3 voix
anonymeno 6fo 14vballadeMa dame m'a congié douné[66]3 voix
anonymeno 7fo 15virelaiA mon pouir garde et vuil garder[67]3 voix
anonymeno 22fo 22vballadeLe mont Aon de Thrace, Doulz pais3 voixChante les louanges de Gaston Febus, protecteur des arts. Gaston est le tuteur de Jeanne de Boulogne, mariée avec Jean de Berry en 1389. La pièce est peut-être de Solage[68].
anonymeno 23fo 23balladeSans joye avoir ne puet3 voix
anonymeno 25fo 24virelaiJe ne puis avoir plaisir3 voix
anonymeno 26fo 24vballadeMedee fu en amer veritable3 voixUne attribution possible : Philippus de Caserte. La proposition est confortée par la grande similarité de style avec Par les bons Gedeon et Sanson delivre (no 71)[8].
anonymeno 33fo 27vballadeSe je cuidoie tous jours vivre en tel point3 voix
anonymeno 34fo 28balladeDe quan qu’on peut belle et bonne estrener3 voixLe style excentrique de cette ballade évoque celui de Matteo da Perugia ou du moins un émule de son écriture polyrythmique[8].
anonymeno 35fo 28vballadeUng lion say de tots belle figure3 voix
anonymeno 36fo 29rondeauO bonne, douce Franse3 voix
anonymeno 37fo 29vballadeVa, Fortune3 voix
anonymeno 43fo 32vballadeEn un peril doutous bien delitable[69]3 voix
anonymeno 44fo 33balladePlus ne put musique son secret taire[70]3 voix
anonymeno 52fo 36vrondeauEspoir dont tu m’as fayt partir3 voix
anonymeno 60fo 40rondeauSe vos me voles fayre outrage[71]3 voixCe petit rondeau partage la page avec le Galiot du 59 : il pourrait être aussi de lui. Le texte a été amputé, mais la musique semble complète. Pas d'autre copie.
anonymeno 70fo 45balladeLameth, Judith et Rachel3 voix
anonymeno 74fo 47balladeAdieu vous di, très doulce compaygnie3 voixLa pièce est peut-être de Solage[68].
anonymeno 75fo 47vballadeEntalbion de fluus environnée3 voix
anonymeno 76fo 48balladeDe tous les moys que sunt en la sayson3 voix
anonymeno 82fo 51balladeBien dire et sagement parler[72]4 voixAttribution possible à Solage. Figure aussi dans le manuscrit de Cambrai (BM 1328, fo 3).
anonymeno 92fo 56balladeCine vermeil, cine de tres haut pris3 voixfo 
anonymeno 101fo 60v-61motetApta caro/Flos Virginum/Alma redemptoris [mater]4 voix
anonymeno 103fos 62v-63motetDegentis vita quid prodest/Cum vix ardidici prompti sint/Vera pudicicia4 voix
anonymeno 104fos 63v-64motetPictagore per dogmata/Rosa vernans caritatis/O terra sancta4 voix1374-1376. Le motet est pour Grégoire XI (Pierre Roger de Beaufort), neveux de Clément VI. La partie de ténor Rosa vernans... évoque les armoiries de Roger en jeu de mots sur rosiers et le texte évoque le retour de la papauté à Rome, sous couvert de la reconquête de la Terre Sainte.
anonymeno 105fos 64v-65motetAlpha vibrans monumentum/Amicum querit/Cetus venit heroycus4 voix
anonymeno 107fos 66v-67motetL’ardure qu’endure/Tres dous espoir/Ego rogavi Deum4 voix
anonymeno 108fos 67v-68motetAlma polis religio/Axe poli cum artica4 voix
anonymeno 109fo 68v-69motetInter densas deserti/Imbribus irriguis/Admirabile est nomen tuum[73]3 voixPièce dédiée à Gaston Fébus.
anonymeno 110fos 69v-70motetMultipliciter amando/Letificat juventutem meam/Favore habundare3 voix
anonymeno 112fos 71v-72motetTant a suptile pointure/Bien pert qu’en moy n’a dart/Cuius Pulcritudinem sol et luna mirantur3 voix
anonymeno 113fo 72vmotetD’ardant desir/Se fus d’amer/Nigra est set formosa3 voix
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Éditions

La première édition moderne partielle est de Willi Apel, avec une préface de Paul Hindemith, et date de 1950 : Willi Apel, Robert W. Linker et Urban T. Holmes (éditeurs), French secular music of the late fourteenth century, (avec une préface de Paul Hindemith), Cambridge, Mass., Mediaeval academy of America, no 55, , XII-39-133 Plus tard, Willi Apel en édite une grande sélection dans le Corpus mensurabilis musicae volume 53 (trois tomes, 1970-72)[74].

Une édition en facsimilé a été publiée en 2008 : Yolanda Plumley & Anne Stone (éditeurs), Codex Chantilly : Bibliothèque du château de Chantilly, Ms. 564, Turnhout/Brepols, .

Discographie

  • Ce diabolic chant - Medieval Ensemble of London, dir. Peter Davies et Timothy Davies (janvier 1982 - L'Oiseau Lyre 475 9119)
    Contient : fos 17, 25, 25v, 30v, 31v, 35v, 37, 40, 43v, 44, 44v, 52v, 75.
  • Codex Chantilly : Airs de cour du XIVe siècle - Ensemble Organum, dir. Marcel Pérès (1987 - Harmonia Mundi HMC 901252)
    Contient : fos 11v, 12, 13, 23, 25, 25v, 38, 39v, 43v, 47, 52, 59.
  • Ars Magis Subtiliter: Secular Music of the Chantilly Codex - Ensemble Project Ars Nova, (1989 - New Albion recording NA 021)
    Contient : fos 11, 12, 15, 24v, 29v, 30v, 34v, 39v, 52, 53v, 54, 55v, 59, 60.
  • Musique à la cour de Gaston Febus - Huelgas Ensemble, dir. Paul Van Nevel (25-28 octobre 1991 - Sony SK 48195)
    Contient : fos 22, 21v, 38, 59, 68-69.
  • Balades A III Chans - Ferrara Ensemble, dir. Crawford Young (mars 1994 - Arcana 32 / "Figures of Harmony" 4CD A 382) (OCLC 923760144)
    Contient : fos 12, 19, 22v, 30, 42, 45, 47.
  • Papes et Antipapes, Musiques pour les cours d'Avignon et Rome - Orlando Consort (11/18 septembre 1994 - Metronome MET CD 1008)
    Contient : fos 41, 45v, 63v-64. Trois pièces et un choix d'autres centrées sur les deux cours papales, replacent cette musique dans le contexte historique.
  • Fleurs de Vertus - Ferrara Ensemble, dir. Crawford Young (janvier 1996 - Arcana 40 / « Figures of Harmony » 4CD A 382) (OCLC 923760144)
    Contient : fos 18, 21v, 30v, 36, 38v, 43, 45v, 47v, 56v.
  • En doulz chastel de Pavie - Ferrara Ensemble, dir. Crawford Young (juin 1997, Harmonia Mundi HMC 905241 / « Figures of Harmony » 4CD Arcana A 382) (OCLC 40618524 et 923760144)
    Contient : fos 17, 21, 22, 23v, 24v, 25v, 31, 48v, 50.
  • Ars subtilior - New London Consort : Catherine Bott (soprano), Tom Finucane et Jacob Heringham (luths), Pavlo Beznoziuk et Mark Levy (fiddles), dir. Philip Pickett et flûte à bec (1998 - Linn Records CKD 039)
    Contient : fos 34, 39, 40v, 42, 54v, 55v, 60.
  • The Unknown lover, Machaut et Solage - Gothic Voices (20-22 février 2006 - Avie AV 2089)
    Contient : fos 20, 22v, 23v, 36, 47, 49v, 50, 50v, 57v, 58, 58v, 59. Sept pièces de Machaut le célèbre prédécesseur (aucune du Codex), deux morceaux anonymes (que Yolanda Plumley, auteur du livret propose d'accorder à Solage en raison du style proche) et les dix attributions formelles du manuscrit : voici l'intégrale des œuvres de Solage.
  • Codex Chantilly 1 - Ensemble Tetraktys (2008 - Etcetera KTC 190)
    Contient : fos 13v, 19v, 24, 24v, 28, 36, 40, 44v.
  • Codex Chantilly 2 - Ensemble Tetraktys (janvier-mai 2010 - Etcetera KTC 1905)
    Contient : fos 13, 17, 18/50v, 18v, 19, 20, 20v, 25v, 26v.
  • Codex Chantilly, En l'Amoureux Vergier - Ensemble De Cælis, dir. Laurence Brisset (13-16 avril 2010 - Æon)
    Contient : fos 19, 20, 23v, 29, 32v, 33v, 43v, 47, 50, 54v, 55v, 56v, 59, 60, 64v-65, 67v-68.
  • Corps femenin - Ferrara Ensemble, dir. Crawford Young (2000/2009, Arcana A 355 / 4CD A 382) (OCLC 647357558 et 923760144)
    Contient : fos 32, 39, 33v, 43v.
  • Think Subtilior, le cercle des fumeux - Ensemble Santenay : Julla von Landsberg, voix et organetto ; Elodie Wiemer, flûte à bec ; Szilárd Chereji, vièle ; Orí Harmelin, luth (août 2014, Ricercar)
    Contient ; fos 12, 34v, 49v, 59 (deux versions) et deux pièces de Johannes Ciconia et Matteo da Perugia

Bibliographie

  • (en) Elizabeth Randell Upton, « The Creation of the Chantilly Codex (Ms. 564) », dans Studi musicali III, no 2, Accademia Nazionale di Santa Cecilia, (ISBN 978-88-95341-49-1), p. 287-352. 
  • (de) Ursula Günther, « Der Gebrauch des tempus perfectum diminutum in der Handschrift Chantilly 1047 », Archiv für Musikwissenschaft, Stuttgart, no 17,‎ , p. 277–297 (ISSN 0003-9292, lire en ligne)
    Ursula Günther analyse les italianismes dans les textes français du manuscrit de Chantilly et le Codex Reina, considère que c'est la même main qui a rédigé ces sections des deux manuscrits.

Notes et références

Articles connexes

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