Élections législatives tongiennes de 2010

Des élections destinées à élire les 26 membres d'une Assemblée législative (Fale Alea) réformée se sont tenues aux Tonga le . Bien que des scrutins de ce type se soient tenus depuis la fondation de l'État tongien moderne par la Constitution de 1875, celui de sera en effet le premier à produire une assemblée dont la majorité des membres sont élus au suffrage universel direct par les citoyens. Ce vote constitue ainsi la mise en pratique des réformes démocratiques promises par le roi George Tupou V, qui renonce dans le même temps à la majeure partie de ses pouvoirs[1].

Élections législatives tongiennes de 2010
Lord Tu‘ivakano – Représentant de la noblesse
Voix14
Sièges obtenus9
ʻAkilisi Pohiva – Parti démocrate des îles des Amis
Voix12
Sièges obtenus12
sans étiquette
Voix0
Sièges obtenus5
Assemblée législative élue
Par groupes
Diagramme
Premier ministre
SortantÉlu
Feleti SeveleLord Tu‘ivakano

L'Assemblée existante, monocamérale, était jusqu'à présent composée de 30 membres, dont seuls 9 élus par les citoyens, 9 autres étant élus par (et parmi) trente-et-un membres de la haute noblesse, tandis que les 12 autres sièges étaient tenus par les dix membres du Conseil privé, et par deux gouverneurs régionaux siégeant ex officio. À la suite des réformes adoptées par le roi et l'Assemblée, cette dernière ne comptera plus que 26 membres, dont 17 élus par les citoyens ; la haute noblesse conserve le privilège d'élire les 9 autres. Le Premier ministre sera dorénavant élu par les députés (et non plus nommé par le roi), et exercera l'essentiel du pouvoir exécutif. Le souverain conservera néanmoins le pouvoir de dissoudre le gouvernement, et d'opposer son veto à la législation adoptée par le Parlement[1]. Mais il n'exercera l'essentiel de ses pouvoirs exécutifs qu'en accord avec les "conseils" du Premier ministre issu de la majorité parlementaire[2] ; en cela, la monarchie tonguienne adopte la convention constitutionnelle qui régit déjà les fonctions du monarque au Royaume-Uni, pays qui fut la source d'inspiration des institutions tonguiennes au XIXe siècle[3].

Le Premier ministre sortant, Feleti Sevele, quittait la politique et ne visait donc pas un nouveau mandat ; ces élections amèneraient donc à la désignation d’un nouveau premier ministre[4]. Finalement, le , après des semaines de discussions entre les députés, ce fut Lord Tu‘ivakano, un représentant de la noblesse, qui fut élu Premier ministre par ces derniers, avec quatorze voix contre douze pour le roturier et représentant du peuple ‘Akilisi Pohiva[5].

Origines

George Tupou V, devenu roi en , était partisan d'une évolution des institutions vers la démocratie. Son père et prédécesseur Taufa'ahau Tupou IV avait déjà, en février, nommé Premier ministre Feleti Sevele, membre « modéré » du mouvement pro-démocratique, le premier roturier à occuper ce poste, jusque lors réservé aux membres de la famille royale et de la haute noblesse. En , des manifestations en faveur de la démocratie dégénérèrent en émeutes à Nukuʻalofa, faisant huit morts lorsque des émeutiers se retrouvèrent prisonniers d'un bâtiment qu'ils avaient incendié. Dès lors, la conduite des réformes s'accéléra. En 2008, le roi promit de se décharger de ses pouvoirs, et que des élections en 2010 marqueraient une transition démocratique. Malgré les pressions populaires, l'instauration de la démocratie est essentiellement perçue comme une initiative du monarque[3].

Peu avant l'élection, lors d'un entretien avec Radio Australia, George Tupou V expliqua que les nouvelles dispositions institutionnelles conservaient l'essence de la Constitution introduite par George Tupou Ier en 1875, tout en la modernisant pour répondre à la nécessité pour tout État du XXIe siècle d'être une démocratie[6].

Partis politiques

La politique tongienne, jusqu’alors dominée par la noblesse, ne s'appuie pas traditionnellement sur des partis politiques. Avant l'élection, la principale organisation était le Mouvement pour les droits de l’homme et la démocratie[7]. En vue du scrutin, il constitua un Parti démocrate des Îles des Amis. Ce dernier indiqua que, s'il remportait l'élection, son président ‘Akilisi Pohiva deviendrait premier ministre et que celui-ci formerait le gouvernement. Il mettrait au clair les finances du royaume, trop opaques à ses yeux, et poursuivrait les réformes constitutionnelles en abolissant les sièges réservés à la noblesse au Parlement[8].

Sondages

Un premier sondage, début novembre, indiqua que la préoccupation première des électeurs était l'économie - l'avenir des habitants, leur salaire, leur capacité à subvenir aux besoins de leurs enfants[9].

Un sondage quelques jours avant l'élection suggéra que les candidats des mouvements pro-démocratique pourraient peiner à obtenir suffisamment de sièges pour former une majorité parlementaire et constituer un gouvernement. Parmi les mieux connus de ces candidats, ‘Akilisi Pohiva et ‘Isileli Pulu, députés sortants, paraissaient nettement en tête dans leurs circonscriptions, mais d'autres tels Sitiveni Halapua ou Sangster Saulala semblaient n'arriver que deuxièmes. La Australian Broadcasting Corporation, commentant ce sondage, suggéra que les députés issus de la noblesse pourraient peut-être constituer une majorité avec des élus du peuple « connus pour être liés de près aux nobles », et qui semblaient avoir la faveur des électeurs dans certaines circonscriptions[2].

Pour autant, le Mouvement pour les droits de l’homme et la démocratie exprimait sa confiance, pensant remporter une majorité des dix-sept sièges ouverts aux élus du peuple[8].

Résultats

Représentants du peuple & élection du premier ministre

Les réformes ont créé dix-sept circonscriptions à siège unique, en lieu et place des cinq circonscriptions à sièges multiples utilisées lors des élections d'avril 2008. Dix de ces circonscriptions se trouvent à Tongatapu, trois à Vava'u, deux à Ha'apai, une à 'Eua et une aux Niuas[10],[11]. Il y eut au total 147 candidats[12].

Le Parti démocrate des Îles des Amis fut le grand gagnant des élections, remportant douze de ces dix-sept sièges. Parmi ses élus furent ʻAkilisi Pohiva, ʻIsileli Pulu, Sangster Saulala, Semisi Sika, Semisi Tapueluelu et Sitiveni Halapua. Les cinq autres sièges revinrent à des candidats sans étiquette[13],[14],[15].

Les représentants de la noblesse étant convenus qu'un représentant du peuple devait être Premier ministre, ʻAkilisi Pohiva apparaissait comme de loin le candidat le plus probable à la suite de l'annonce des résultats[13]. Les deux principaux autres prétendants au titre -le vice-Premier ministre sortant Viliami Tangi et l'ancien ministre de la Police Clive Edwards- avaient par ailleurs été battus dans leurs circonscriptions. N'étant plus députés, ils ne pouvaient prétendre à ce poste[16].

Des dissensions parmi les démocrates créèrent un temps d'incertitude, avant que le Parti démocrate ne déclare bénéficier du soutien de dix-huit députés, dont certains représentants de la noblesse[17].

L'élection du Premier ministre par le Parlement eut lieu le . Pohiva obtint douze voix, ceux des députés de son parti, tandis que les neuf nobles et l'ensemble des cinq roturiers sans étiquette, soit quatorze députés, soutinrent le noble Lord Tuʻivakano, qui devint donc Premier ministre, le premier de son pays à avoir été élu par le Parlement plutôt que nommé par le roi[5]. Ce résultat a été décrit comme une apparente « victoire pour les traditionalistes »[5] ; le journal australien The Age décrit Tuʻivakano comme étant un « conservateur »[18].

Liste complète des résultats par circonscription[19],[20]

Tongatapu 1

CandidatPartiVoixPourcentageRésultatRemarques
Poutele Kaho Tuʻihalamaka270
Soloni Lutui(non disponible)
ʻEliesa Fifita38
ʻAkilisi PohivaParti démocrate des Îles des Amis1657rééluDéputé sortant.
Sione Keuate Tupouniua(non disponible)
Taniela Talifolau Palu567
Siosifa Moala Taumoepeau13
ʻInoke Fotu Huʻakau105

Tongatapu 2

CandidatPartiVoixPourcentageRésultatRemarques
Tevita Kaituʻu Fotu49
Semisi Kioa Lafu SikaParti démocrate des Îles des Amis849élu
Mele Teusivi ʻAmanakiParti démocrate travailliste65
Malia Viviena ʻAlisi Numia Taumoepeau306
Sione Tuʻitavake FonuaParti pour une Construction nationale durable181
Semisi ʻUluʻave Mila12
Siale ʻAtaongo Puloka111
Sitafooti ʻAho26
Viliami Taʻu Tangi641Vice-Premier ministre sortant.

Tongatapu 3

CandidatPartiVoixPourcentageRésultatRemarques
Pesalili Kailahi23
Sione ‘Uhilamoelangi Liava‘a83
Betty BlakeParti démocrate travailliste103
Falakiko Karl Taufaeteau35
Viliami Takau289
William Clive EdwardsParti démocrate populaire681Député sortant.
Ancien Ministre de la Police.
David Kaveinga Vaka191
Semisi Nauto Tuapasi ‘Ata‘ata12
Penisimani Vea257
Sitiveni HalapuaParti démocrate des Îles des Amis1047élu

Tongatapu 4

CandidatPartiVoixPourcentageRésultatRemarques
Tupou M. Loto‘aniu74
‘Ahongalu Fusimalohi223
‘Etuate ‘Eniti Sakalia215
Mele Tonga Savea Linda Ma‘u71
‘Etika Koka302
Christopher Mafi24
‘Isileli PuluParti démocrate des Îles des Amis1274éluDéputé sortant.

Tongatapu 5

CandidatPartiVoixPourcentageRésultatRemarques
‘Ofa Tautuiaki24
Sione Langi Vailanu98
Siale Napa‘a Fihaki302
Hekisou Fifita285
‘Aisake Valu Ekesans étiquette679élu
Semisi Tongia233
Sitiveni Takaetali Finau46
Sione Tu‘alau Mangisi116
Lopeti Senituli155
Sateki Finau4
Maliu Moeao Takai616
Pita Ikata‘ane Finaulahi19
Sione V. Loseli238
liste à compléter

Représentants de la noblesse

Les trente-quatre électeurs appartenant à la haute noblesse et ayant cette prérogative élisent, le même jour, leurs neuf représentants[21]. Trente-et-un de ces électeurs constituent la haute noblesse héréditaire, et pouvaient être élus par leurs pairs. Les trois autres sont des Law Lords (juges nommés par le roi à des titres de noblesse), auxquels un décret du accorde le droit de voter avec les nobles, mais pas le droit d'être parmi leurs élus[22].

Le taux de participation fut de 100 %. Les élus furent les suivants[23] :

Changements ultérieurs

Lord Fusituʻa (en), le représentant de la noblesse des îles Niuas, meurt le 24 avril 2014. Son fils, le nouveau Lord Fusituʻa, remporte l'élection partielle du 21 mai pour lui succéder[24],[25].

Notes

Articles connexes

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